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Deux koalas à BA

27 juillet 2012

Je suis venu te dire que je m´en vais

Et voilà. Alors que je serai de retour en France dans quelques jours maintenant, et Cléa quelques jours après moi, il est temps de mettre non pas un point final car cette année et ses souvenirs resteront avec nous pendant longtemps, mais disons un point-virgule à cette superbe expérience en Argentine. Dans quelques jours, nous pourrons de nouveau prendre un métro qui possède des lignes qui se croisent, pester contre la SNCF et manger des croissants

L´émotion ressentie au moment de savourer son dernier choripan, de commander sa dernière empanada ou de prendre son dernier colectivo est particulière et il faudrait probablement plus de lignes que vous ne voudrez en lire pour la décrire, alors je vous les épargnerai pour le moment. 

Par contre, personne ne pourra m´empêcher d´écrire quelques derniers mots sur la Colombie, pays merveilleux où nous avons passé deux semaines en compagnie du non moins merveilleux César. A ce propos, le titre de cet article aurait pu tout aussi bien être quelque chose comme "la Colombie à l´arrière d´un pick-up" si je ne m´étais pas laissé charmer par les sirènes tristes de la mélancolie. Car il faut bien dire que du Nord au Sud, nous en avons passé, des heures à l´arrière des camionetas, souvent le seul moyen de transport disponible entre deux villes ou villages. Le voyage se déroule ainsi : tandis que de deux à quatre chanceux (selon la taille du pick-up) sont assis à l´intérieur de la voiture, le reste des voyageurs est assis sur des petits bancs à l´arrière et à l´air libre, tandis que les moins chanceux ou les retardataires se retrouvent en général à rester debout et à se tenir à ce qu´ils peuvent pour ne pas se retrouver éjecté à la première secousse. Quant aux plus téméraires, ils vont directement sur le toit. Ce genre de voyage a de nombreux inconvénients, mais s'il a bien un avantage, c'est qu'il nous permet de faire des rencontres plus ou moins... particulières. Que ce soit cette indigène wayuu de la guajira voyageant avec sa fille et balançant tous ses déchets dans le désert, ou bien cet incroyable taré qui, parce qu'il nous prend pour des "gringos", nous explique que tous les américains vont mourir en 2013, que ceux qui sont condamnés portent sur le front et la main droite le signe du diable "666", et que le seul moyen pour nous d'être sauvés, c'est d'aller assister à une messe de l'église septentrionale (ou quelque chose de ce genre), une secte qui d'ailleurs, s'étend dans le monde entier et serait d'ailleurs, d'après lui, déjà installée en france. Bref, la Colombie est pleine de personnages incroyables.

 

376861_10151162655230857_2039236734_nLe tourisme y est de plus de plus développé. S´il est déjà quasiment à la pointe dans toute la côte Caraïbe, destination préférée des gringos, le sud se développe de plus en plus, de même que la majorité des plus belles régions colombiennes comme la région du café, la région amazonienne ou bien le Santander. Les routes sont de plus en plus bitumés, même si de nombreuses restent assez... précaires, ce qui nous valut quelques nuits agitées. Malgré tout, Il reste quelques zones très difficiles d´accès, telles que la côte Pacifique qui, pauvre et toujours assez dangereux, regorge apparemment de superbes plages et paysages, mais manquent malheureusement de routes... Tout ça pour dire que, contrairement aux autres pays d´Amérique du Sud où il suffit en général de se rendre au terminal de bus de la ville pour attraper le prochain bus pour la destination de son choix, en colombie, les choses se font de manière un peu moins... conventionnelle. Il y a peu de bus par jour pour sa destination, et dans certaines villes, le "terminal" est tout simplement le centre de la ville. Prendre un bus pour sa prochaine destination consiste donc à demander aux gens autour de soi s´ils savent quel voiture part et quand, ou si eux-même vont dans la même direction que nous. Ce qui a aussi beaucoup de charme. Ce qui est aussi très énervant quand on se retrouve planté deux heures à se faire dévorer par les moustiques parce que le conducteur de la voiture ne partira qu´une fois qu´il aura trouvé 8 passagers. 

Malgré le peu de temps que nous avions en Colombie, nous voulions en découvrir le plus possible. L´itinéraire concocté par Cléa et César passait donc par le désert de la Tatacoa, par la région du Huila et du Cauca à la découverte es merveilles archéologiques de Tierradentro et San Agustin puis par la côte Caraïbe au Nord pour finir dans la région désertique et pleine de mystère de la Guajira. 

 Il serait probablement trop long de décrire chaque étape avec précision, alors j'irai vite, j'irai court, en parlant des événements les plus marquants de ces deux semaines, et des plus beaux endroits que nous avons eu la chance de voir. 

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L'arrivée à Bogota fut probablement la plus réconfortante et la plus agréable qui soit. L'accueil absolument incroyable que nous avons reçu de la part de César et de sa famille n'y est d'ailleurs pas pour rien. A peine arrivés chez César, dans le nord de Bogota, que sa mère nous faisait goûter une des grandes spécialités culinaires de la ville : le très bon ajiaco (une sorte de soupe, ou bouillon, ou se retrouvent des légumes, de la viande, du maïs, et du patacon, un "machin" frit à la banane servi dans tous les plats colombiens). Il nous a donc fallu peu de temps pour faire connaissance avec les coutumes culinaires colombiennes : qu'il fasse froid ou chaud, qu'il pleuve ou qu'il vente, les colombiens commencent chaque repas avec une soupe (voilà qui devrait plaire à un certain ludovic s'il nous lit), prennent leur plat principal avec du riz et du patacon, et sautent le dessert. Cette première soirée fut aussi l'occasion pour nous de découvrir une chose qui ne cesserait de nous enchanter durant toute la durée de notre séjour : les fruits. La mère de César nous avait préparé un incroyable jus de "Tomate de arbol" (la "tomate de l'arbre) et de maracuya (fruit de la passion), soit un des meilleurs jus jamais goûtés dans ces contrées. Les jus de fruit là-bas sont une institution. A table ce n'est ni de l'eau, ni de vin que l'on sert, mais bien du jus, en toutes circonstances. Les fruits quant à eux sont légion : César nous racontait que sur tous les fruits connus dans le monde, seuls 5 ou 6 ne sont pas trouvables en Colombie. Parmi ceux goûtés que l'on ne connait pas en France : le guanabana, le mamoncillo, le zapote, etc etc...

Après un match de football à 2500m d'altitude (Bogota est une des capitales les plus hautes au monde, la deuxième je crois), et une nuit bien réparatrice, nous entamions donc notre premier jour dans la capitale colombienne. Bogota est une ville immense (moins grande que buenos aires cependant) très différente des autres capitales sud-américaines, même si on y retrouve certaines similitudes : les avenues immenses, les " petites villes dans la ville" (comme Osaken, quartier jeune et chic par excellence) et un nombre conséquent de voitures et de motos, toutes conduisant comme des tarés. Bogota possède néanmoins quelque chose de spécial, un air particulier, qui la rend très agréable, notamment le dimanche, jour durant lequel une partie de la grande avenue est fermée aux voitures qui laissent leur place aux vélos, rollers, etc (un système repris ensuite par d'autres grandes capitales du monde). Mais à part ça, la ville n'offre pas beaucoup d'attractions touristiques, même si le quartier de la Candelaria et la place Simon Bolivar sont des endroits sympas où se balader. Le musée de l'Or est aussi un "must-see", rassemblant la plus grande collection du pays, et permettant de mieux comprendre les civilisations pré-hispaniques, et surtout d'admirer leur génie artistique. La fondation Botero vaut aussi la peine de s'y attarder, moins pour les oeuvres de Botéro (un peu... répétitives) que pour celles des artistes internationaux. En fait, tout le charme de Bogota se retrouve dans ses rues, pleines de vendeurs ambulants de choses incroyables telles que le "canelazo", boisson légèrement alcoolisée (du fameux aguardiente, sorte "d'anisette") mélangée à l'agua de panela, que l'on tire de la canne à sucre. C'est toute l'histoire de la Colombie qui se retrouve sur ses murs et les informations que nous donnait César nous ont permis de mieux comprendre un pays à tous les égards... compliqué.

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Le lendemain, nous partions en compagnie des parents de César en direction du nord de Bogota, tout d'abord pour visiter une cathédrale de sel (magnifique, mais gâchée par les "attractions" inventées pour attirer les touristes, dont un sacré spectacle de son et lumières, affligeant et carrément blasphématoire) et surtout les petites villes de la région du Boyaca, dont est originaire le père de César. Après un repas à Chiquinquira, juste en face d'une cathédrale visitée par Jean Paul II, nous avons donc pu passer quelques heures à Villa de Leyva, superbe ville coloniale dont la place principale est une des plus grandes que j'ai jamais vues sur le continent ! Ce petit voyage fut encore une fois l'occasion de faire d'autres découvertes, dont une surtout : l'arepa boyacence, una arepa (sorte de petit pain fourré) au fromage.

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Bon je ne détaillerai plus tout ce qu'on a pu manger parce que je ne m'en sortirai pas, mais vous aurez compris que ce voyage fut une sorte de dégustation culinaire permanente, car la cuisine colombienne, bien que pas très développée "institutionnellement" disons, offre de nombreuses surprises.

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Après Bogota, il était temps de partir, pour césar de dire au revoir à ses parents, et pour nous tous de s'en aller, en précipité, vers le sud. Pas trop loin au Sud, à Neiva, pour y découvrir le désert de la tatacoa. Ce désert, pas encore très touristique, offre de nombreux paysages différents, comme un grand air de far west. L'air, puisqu'on parle de cela, y est aussi particulièrement étouffant. Le désert de la Tatacoa possède une situation géographique propice à l'observation des étoiles, puisqu'en plus d'être un désert (et donc sans trop de pollution lumineuse), il est situé tout près de la ligne de l'Equateur. Ceci permet d'observer sur un même ciel les constellations de l'hémisphère nord et de l'hémisphère Sud. C'est donc à l'observatoire que nous avons passé notre soirée, à contempler les étoiles et les planètes (Saturne et Mars en l'occurrence), tandis qu'un astronome nous faisait la leçon.

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Le lendemain, c'était départ à 7h (ni le premier, ni le dernier) pour nous rendre a Tierradentro. Le nom Tierradentro désigne à la fois le parc archéologique de Tierradentro, située dans la région du Cauca, et la civilisation qui aurait vécu là il y a maintenant quelques 5000 ans. Nous logeons dans le seul véritable hôtel du petit village de San Andrès de Psimbala, peuplé et créé par les indigènes de la région. Le parc archéologique de Tierradentro est composé 6 sites différents, la plupart renfermant des tombeaux, appelés "hypogées". La civilisation de Tierradentro avait en effet coutume de creuser des tombes et d'y enterrer leurs morts (avec plus ou moins de style selon la catégorie social du décédé). Mais cela ne termine pas là, car après un certain temps, les morts étaient déterrés, et réenterrés (leurs restes reposant dans des urnes) dans ces fameuses hypogées, en compagnie de leur famille, ou bien d'autres petits camarades. C'est que pour les civilisations du Sud de la Colombie, la mort était bien plus importante que la vie, ce qui explique donc le soin apporté à ces tombes pour la construction desquelles une année entière était nécessaire. Le résultat est spectaculaire. Dans de nombreuses hypogées, la couleur est restée, de même que les formes, et les visages rectangulaires dessinés sur les piliers. On comprend très vite l'importance sacrée qu'avait la mort pour cette civilisation, on imagine le travail réalisé, et on essaie de comprendre comment peut-on trouver la foi suffisante pour construire de telles "oeuvres". D'où vient elle, et comment trouve-t-elle la force de s'exprimer ainsi ? L'ensemble est à la fois effrayant et hypnotique, merveilleux et fascinant.

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Nous n'avons pas trop le temps d'y penser cependant car suite à une petite erreur de chemin, nous devons courir pour ne pas louper le pick-up pour San Agustin. La ville de San Agustin n'a en soi aucun intérêt, à part "La Casa de François", l'auberge pleine de français où nous restions. Mais ce n'est pas pour la ville que nous étions là, sinon pour ce qui est tout autour. A San Agustin vivait il y a 5000 ans la civilisation de... San Agustin. Encore une fois, personne ne sait qui ils étaient exactement,  ce qu'ils faisaient là, et pourquoi ils ont disparu. Cependant, ils ne sont pas partis sans laisser un petit quelque chose : de très nombreuses statues anthropomorphes, à la fois humaines et animales, réalisées avec un sens du détail impressionnant. Ce qui marque le plus à la vision de ces statues, c'est la force de leur expression, et par extension, l'inspiration et le génie de leurs sculpteurs. Pourquoi les faisaient-il ? Personne ne le sait, et c'est ce qui rend le site encore plus génial. Il faudra aussi préciser que de nombreuses statues ont été volées par les "guaqueros", sorte de "chercheurs de trésors" qui volaient les trésors et les revendaient au marché noir. De nombreuses statues ont ainsi été retrouvées en France, à Nantes notamment. Le patrimoine archéologique colombien a ainsi été pillé par l'Europe, et de nombreuses pièces sont encore aujourd'hui soit perdues, soit dans les mains de riches propriétaires étrangers... A part ça,  c'est aussi à San Agustin que nous avons pu faire du cheval, ce qui faisait grand plaisir à César mais qui a failli l'empêcher de marcher pendant une semaine !

 

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Après San Agustin, nous nous dirigeons, vers le nord, la côte Caraïbe et nous arrivons sans encombre à Cartagena De Indias, après un passage éclair à Cali, la capitale de la salsa. Cartagena est une des plus belles villes d'Amérique du Sud et une des plus fascinantes. Ancienne ville la plus importante des colonies espagnoles, de par son emplacement stratégique, il règne aujourd'hui l'impression d'une ancienne grande ville tombée en décadence. On imagine en se baladant dans les rues tout le pouvoir, toutes les richesses qui y ont vécu. Ici, ce sont tous les clichés des Caraïbes qui se retrouvent au même endroit : l'air est chaud, les mouvements se font lents et lancinants, les hommes, tous noirs et descendants des esclaves, passent leur journée dehors, assis sur une chaise ou couchés sur les trottoirs, et les couleurs des bâtiments, jaunes, bleus ou ocre, éclatent. On se croirait chez Gabriel Garcia Marquez. Bon cet article se fait long alors ici je laisserai parler les superbes photos de Cléa. Je vais faire de même pour le parc national de Tayrona, superbe parc national qui se raconte mieux en photos qu'en mots, mais où nous avons non seulement passé de superbes heures à se baigner dans des plages paradisiaques, mais aussi une courte nuit dans un hamac.

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Ce qui m'amène au désert de la Guajira, région la plus au nord de la Colombie. Cabo de la Vela est un minuscule village, où le désert se mêle à la mer et le vent au sable. Là bas nous avons passé deux nuits étranges, à manger des poissons et des fruits de mer, à marcher dans le désert, et à se baigner dans des plages au calme plat. Le vent est si fort dans ces contrées que les vagues ne vont pas vers le rivage, mais en sens inverse. Nous avons aussi pu faire la connaissance des Wayuus, la plus grande communauté indigène de Colombie, et parmi eux, un certain nombre qui avaient voté pour Hugo Chavez. C'est que la plupart des Wayuus possèdent la double nationalité colombienne et vénézuélienne, leur permettant ainsi d'aller acheter de nombreux biens de consommation au Venezuela et de les revendre en Colombie. la contrebande, dans le nord, est donc particulièrement développée. Une grande source de tristesse, à la Guajira, ce sont les déchets qui sont jetés dans le désert sans aucun sens écologique, ou même sans aucun sens... commun. C'est à dire que de nombreuses maisons dans le désert sont tout simplement entourées de déchets, et que certaines plages sentent la poubelle. Un aspect assez désagréable qui ne semble pas prêt de s'arranger. Cependant, il n'empêche pas de profiter d'une région quasiment mystique, une région où l'Etat semble être absent et où tout peut arriver. On ne se sent plus vraiment en Colombie à la Guajira, mais vraiment autre part, dans une zone sans règles ni lois. Quand la police se pointe, on dit "Llego la ley"...

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Et voilà, après un retour à Bogota, Cléa s'en va pour les Etats-Unis, et moi je rentre à Buenos Aires, pour une petite semaine avant mon retour en France. Une semaine triste, passée au cinéma, entre Batman (pas top) et Spiderman (pas mal).Une semaine pour clore cette année, retourner aux restaurants qui nous manqueront, et se dire que l'on reviendra. Peut-être plus tard. Bientôt. Faire un bilan de cette année serait impossible, pour le moment en tout cas. Il faudra attendre, pour comprendre ce qui nous a marqué, et réaliser ce qui nous a changé. Mais en attendant, il y a d'autres priorités : par exemple, manger du fromage.

Fromage. Ce sera donc le dernier mot de ce blog, pour boucler la boucle.

Hasta luego.

 

PS : Certains auront peut être remarqué que cet article est publié alors que je suis déjà rentré en France, ce qui pourrait rendre quelques lignes un peu incohérentes. Pour ces gens-là, ces rabat-joie, ces empêcheurs de tourner en rond, ces imbéciles, je m'explique : internet m'ayant fait défaut pour mes derniers jours en Argentine, je n'ai pu terminer cet article (et notamment rajouter les photos) qu'une fois rentré sur le Vieux Continent. D'ailleurs, le sentiment que l'on ressent au retour est ambigu, mélange d'une espèce de soulagement et d'une tristesse infinie.

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2 juillet 2012

Qu'est ce que la misère?

Cela fait depuis notre escapade à Santiago que nous n'avions pas écrit sur ce blog... Maintenant, nous sommes à trois jours du départ. Demain, je commencerai mes valises, une tâche qui s'avérera certainement difficile étant donné qu'après notre voyage en Colombie, je ne reviens pas à Buenos Aires! Si on m'avait dit, il y a un an, qu'avant le retour en France je passerai par la Colombie puis les Etats-Unis, je ne l'aurai certainement pas cru. En effet, j'enchaîne deux semaines en Colombie avec Eliott et notre side-kick colombien César, puis je rejoins mes parents et mes soeurs, que je n'ai pas vu depuis un an, à New York. Une troisième année qui se finit merveilleusement bien, faut-il se méfier? Pendant ce temps, Eliott rejoindra Buenos Aires où il passera encore quelques jours avant de s'envoler pour la France. Tout ça pour dire que le départ est imminent et que de nouvelles aventures nous attendent, et que nous sommes incroyablement chanceux. 

Mais je tenais à prendre le temps de vous parler d'un thème qui me tient particulièrement à coeur. Depuis quelques mois, je fais du volontariat avec Un Techo para mi pais (ONG présente dans toute l'Amérique latine qui a pour priorité d'améliorer le logement dans les bidonvilles).  Tous les samedis, (et jours fériés, et de temps en temps un weekend complet), nous effectuons des enquêtes dans le bidonville pour détecter les situations les plus urgentes. Nous allons chez les différentes familles, recueillons des informations sur leur situation et celle de leur logement, puis leur assignons un ordre de priorité.

Cette activité, bien que je l'ai commencé tard, a incontestablement changé le cours de mon année. Très rapidement, le samedi est devenu le jour le plus important de ma semaine. La fois où je n'y suis pas allée, cela m'a manqué.

Comment parler d'un bidonville? Le sujet est délicat. Il y a plusieurs pièges à éviter. Eviter, premièrement, de rendre la pauvreté esthétique, poétique quelque part. Il ne faut pas rentrer dans une rhétorique qui embellit l'extrême pauvreté: cette dernière est toujours une souffrance. Eviter les clichés sur la "culture" des pauvres, ensuite: il n'y pas d'explication culturelle qui vaille pour qualifier tous les pauvres d'un coup. Eviter le piège du "nous" et du "eux": il faut apprendre à casser ces barrières là pour gagner la confiance des habitants du bidonville. 

Les villas-miserias argentines sont nombreuses: on estime qu'un quart des habitants du Conurbano bonaerense (agglomeration de Buenos Aires) y vit. Comment ces personnes arrivent elles là? La plupart des habitants ont atteri là à la suite d'une migration, interne le plus souvent. Les argentins pauvres arrivent des provinces les plus déshérités (Chaco, Misiones, Corrientes, Catamarca, Santiago del Estero et j'en passe). Ensuite les étrangers, arrivés des pays limitrophes: la plupart sont paraguayens, mais il y a aussi de grandes communautés péruviennes et boliviennes. Ils sont venus avec l'idée qu'ils auraient plus d'opportunités et d'emploi en se rapprochant de la capitale. Est ce vrai? Difficile à savoir. Si en effet de nombreux habitants affirment gagner bien plus dans la région de Buenos Aires que dans leur région d'origine, nombreuses sont les désillusions. 

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La structure familiale de ces familles est très variable: le plus souvent il s'agit de familles recomposées, parfois avec en plus des enfants de chaque conjoint des cousins, des neveux, des grand-parents qui n'avaient pas d'endroit où aller. Généralement, le père travaille dans la construction, quand il trouve du travail. Il gagnera au maximum 3000 pesos par mois (520 euros), mais il connaitra de fréquentes périodes de chômage. Il sera le plus souvent le seul à avoir un revenu dans le foyer. Les femmes sont presque invariablement amas de casa ("maitresse de maison", c'est plus joli que mère au foyer); si leurs enfants sont grands, elles trouvent parfois du travail comme femmes de ménage ou en s'occupant d'enfants ou de personnes âgées. Si elles ont des papiers, elles peuvent toucher la Asignacion Universal por Hijo, de 200 pesos (34 euros) par enfant jusqu'à 5 enfants, dont 20% est retenu chaque mois et versé à la fin de l'année sur présentation du carnet de présence scolaire et du carnet de vaccination. Si elles n'ont pas de papiers, elle ne peuvent prétendre qu'au Plan Leche (trois litres de lait par semaine et par enfant et une dizaine d'euros par mois). Le nombre d'enfants est variable, mais ils sont en général nombreux et le premier nait presque toujours avant que la mère n'ait 18 ans. Il y a de nombreuses mères célibataires, et souvent leur cas est le plus dramatique, car ne pouvant travailler, elle n'ont pas ou peu de revenus.

Les maisons de ces familles très pauvres sont souvent si précaires qu'on se demande comment elles tiennent debout. Ce sont de minuscules pièces avec des murs en bois de mauvaise qualité (le plus souvent il y a des espaces entre les planches qui laissent passer tout le froid et le vent), un toit en tôle (en général la pluie entre dans la maison), et un sol soit en ciment, soit tout simplement en terre battue. Leurs maisons s'inondent et s'écroulent assez régulièrement. La promiscuité est en général très forte puisque tous dorment dans la même pièce, parfois dans le même lit. De ce fait, les cas d'incestes ne manquent pas. 

Comment est-ce qu'on complète une enquête? Au fil du temps, j'ai compris que l'idéal est que celle-ci se fasse sur le mode d'une conversation et non d'un interrogatoire. L'enquête est déjà par nature invasive puisqu'on demande aux familles "Combien tu gagnes?", "Es tu enceinte?", "Qui dort où?", "Des problèmes de drogue?", "Où allez vous aux toilettes?". C'est donc essentiel de prendre le temps de discuter avec chaque famille, d'accepter un mate si elle vous en offre, de créer une relation de confiance, chose pas évidente dans cet univers. Nous avons toujours été très bien reçus. De nombreuses familles semblent n'attendre que cela, qu'on leur donne la parole et qu'on les écoute. 

Dans une partie de l'enquête, on pose des questions aux familles sur leur perception du bidonville. Dans les principaux problèmes évoqués apparaissent sans surprise le chômage, la drogue, l'alcool, l'abandon scolaire des adolescents, le manque de nourriture et de vêtements pour les touts-petits. Fait plus surprenant, les thèmes de la grossesse non-désirée, précoce, et de la violence au sein de la famille n'apparaissent jamais. J'en déduis non pas que ce ne sont pas de grands problèmes dans ces quartiers, mais que ce sont encore des thèmes tellement tabous qu'ils sont complètement impénétrables. Difficile d'évoquer les grossesses adolescentes comme un "problème" dans un quartier où pratiquement toutes les mères ont eu leur enfant très tôt. Elles sont très rapidement sur la défensive. Dur aussi d'évoquer la violence dans la famille dans un quartier où le machisme est si solidement enraciné que nombreuses sont les femmes qui ne peuvent pas participer à l'enquête avant d'avoir demandé la permission à leur mari (qu'importe si celui-ci est un déchet humain alcoolique et irresponsable, il reste le chef de famille). Dernièrement, j'ai été surprise d'entendre Maria, une jeune mère de deux enfants, affirmer qu'elle allait construire une maison en brique, seule. "Un homme de la famille pour t'aider?" demande-t-on. "Non", répond-elle avec une grand lueur de fierté dans les yeux. "Pas d'hommes ici! Je me suis séparée et ce n'est pas retourner avec un de ces boludos (ici, "boulet")".

Il est instructif d'observer quels évènements ont changé le cours de la vie de ces familles. Certaines ont toujours été aussi pauvres. Dans la plupart des cas c'est une séparation, une période de chômage, un enfant supplémentaire, un veuvage ou une maladie qui est venu aggraver leur sort. Parfois, leur situation s'améliore quant un enfant quitte le foyer, trouve un travail, quand un proche leur vient en aide, quand les femmes trouvent un mari ayant un emploi.

On est confronté à des cas très variés lorsqu'on complète ces enquêtes dans le bidonville. Des familles pleines d'énergie et confiantes qui ont la certitude que l'avenir leur réserve une vie meilleure. Des familles abattues, prostrées dans la misère, qui rénoncent presque à vivoter. Des cas difficiles, lorsque la drogue, l'alcool ou la violence vient s'en mêler. Ces familles partagent les mêmes conditions de vie mais des dynamiques parfaitement différentes; c'est pourquoi il est très difficile d'émettre des généralités sur ces familles. Quelques cas qui m'ont marqué pour illustrer ce propos.

La première fois que j'ai complété une enquête, j'ai eu un pincement au coeur en apprenant que la jeune mère de famille s'appelait Milagros (Miracles). Elle était péruvienne, avait 23 ans, trois enfants dont un nouveau-né, et vivait dans une minuscule cabane qui s'inondait avec sa mère, qui travaillait de temps en temps comme femme de ménage, et un neveu adulte au chômage. Les sept personnes se partageaient trois minuscules lits. 

Damira est certainement le cas le plus difficile que j'ai vu dans le bidonville: cette jeune femme avait 20 ans et déjà trois enfants (un qu'elle avait eu à 15 ans, le deuxième à 17 et le troisième à 19). Elle vivait dans une maison de tôles en métal pleine de trous qu'elle ne prenait même plus la peine de couvrir d'une planche ou d'un tissu. Ses enfants étaient très sales et plein de poux, et franchement maigres. Elle avait l'air complètement droguée quand nous sommes retournés la voir pour faire une seconde visite (nous faisons toujours au minimum deux visites à la même famille): incapable de nous dire où était sa fille de trois ans, ne voulant pas répondre aux questions, ne souhaitant pas nous laisser rentrer dans sa maison... Damira a 0 revenus: elle est argentine mais n'a pas de carte d'identité, donc ne peut pas toucher d'allocations pour ses enfants. Elle ne vit donc que de la charité de ses voisins, et grâce à sa mère qui vient la voir depuis un bidonville voisin plusieurs fois par semaine. Elle souffrait d'une maladie, vraisemblablement sexuellement transmissible, qui avait couvert son visage de petites plaies. Elle ne nous donnait pas forcément envie de l'aider, elle était peu accueillante et très évasive. On se demandait: pourquoi ne bouche-t-elle pas ce trou dans le mur? Pourquoi ne lave-t-elle pas un peu ses enfants? Pourquoi ne les surveille-t-elle pas un peu plus? Mais il ne faut tomber dans le piège de ne vouloir aider que les "bons" pauvres. Il faut chercher à éradiquer l'extrême pauvreté, point. 

La famille de Lydia et Juan pourrait être un cas d'école. Ce couple a six enfants et vient d'une province pauvre du Nord du pays. Ils touchent des allocations pour leurs 5 premiers enfants, et vivent tous les huit dans une seule pièce. Arrivés récemment au bidonville, ils n'ont pu s'installer que près du petit ruisseau où les habitants jettent leurs ordures, donc leur maison s'inonde occasionnellement d'eau puante et contaminée. Le père est au chômage. La famille vit donc avec 1000 pesos (175 euros). Divisé par le nombre de personnes, cela fait environ 20 euros par personne et par mois, soit 60 centimes d'euro par personne et par jour. Si la mère de famille était très sympathique et connaissait par coeur tous les numéros de carte d'identité de ces enfants, le père était beaucoup plus rustre et à vrai dire assez effrayant. Il nous racontait avoir pris un terrain de l'autre côté du bidonville pour que ses enfants ait un terrain pour construire quand ils se marierait.   Cela m'a un peu fait rire sachant que les enfants avait entre 0 et 12 ans, et j'ai laissé échappé : "Enfin, ce n'est pas pour tout de suite, ils sont petits encore!". Ce à quoi le père a répondu, imperturbable "Mais regarde, la fille va bientôt avoir 13 ans. A 12-13 ans, on a son premier enfant! Si elle se trouvait un homme, elle pourrait quitter la maison!". Que penser de ce père qui veut caser sa fille pré-adolescente ? Peut on lui reprocher de vouloir une personne en moins dans la maison? D'avoir interiorisé que les adolescentes sont des fille-mères ? De n'espérer rien d'autre pour sa fille? C'est extrêmement triste, mais comment en est-on arrivé à lui enseigner que rien d'autre n'était possible?

598522_10151051925130579_1664805407_nMoi très sérieuse au boulot!

Un jour alors que nous complétions des enquêtes un petit s'est approché de moi et m'a dit, très sûr de lui, "Il fait que vous alliez à la maison de ma Mama!". Il y avait très peu de chances que l'enquête de sa mère soit dans celles qui m'avaient été attribuées pour ce jour, et j'arrivais à peine à garder les yeux ouverts (la nuit précédent, nous avions dormi dans une paroisse et il avait fait 0 degrés, autant dire qu'il faisait si froid que personne n'avait vraiment dormi). Mais pour être gentille, je jette un rapide coup d'oeil aux enquêtes et trouve une famille qui correspond en effet à celle que me décrit le petit. "Tu es Marcelo?", je lui demande. Il me sourit timidement: c'était lui. Ce petit me paraissait très débrouillard et intelligent pour son âge. En arrivant chez lui, on a compris pourquoi: sa mère, une femme d'une gentillesse hors du commun, était retardée mentale. Le petit Marcelo s'était habitué à compléter la où sa mère ne pouvait pas. A peine arrivés, il lui dit "Mama, il faut faire un mate!". Tout allait "bien" dans cette petite famille jusqu'à ce que le père ait la tuberculose et ne puisse travailler. Il a guérit, mais est resté plusieurs mois sans travailler. Le petit Marcelo en touche pas d'allocations car sa mère n'a pas de carte d'identité.

 En dehors de ces enquêtes, j'ai également participé un à week-end de construction, car je voulais voir à quoi ces enquêtes aboutissaient. Cette fois, Eliott est venu aussi. 

La famille chez laquelle j'ai construit était assez différente des familles auxquelles j'avais fait les enquêtes: c'était dans un bidonville dans lequel il y avait déjà eu plusieurs phases de construction, donc je n'ai pas eu affaire à un des pires cas. Il s'agissait d'un couple, José (43 ans) et Myriam (34 ans) et de leur 4 enfants, issus d'unions antérieures, tous ayant entre 14 et 20 ans. José est peintre en bâtiment, travaille fréquemment mais de façon irrégulière. Myriam est mère au foyer mais travaille souvent en gardant de jeunes enfants ou en faisant le ménage. Le fait que les 4 enfants soient grands était incontestablement un soulagement car ils travaillent tous (comme ouvrier en bâtiment sauf le plus jeune qui vend des poules), sauf la fille de 19 ans qui est partie vivre chez son mari (qui a un emploi stable comme vigile de sécurité de nuit). Ils avaient une maison, minuscule et parfaitement insalubre, abimée par les récentes tempêtes, et un potager (citrouilles et courges en tout genre, aubergines, piments, poivrons...). Cette famille est un exemple d'une famille qui redonne espoir: très pauvres, ils étaient quand même très unis et solidaires, avec une grande envie de progresser (Myriam et José ont prévu de se marier très prochainement). La fille ainée, Vanina, paraissait hors-sujet dans ce quartier: jolie et délicate, elle choisissait soigneusement ses mots et était extrêmement polie et amicale. La famille a été d'une générosité hors du commun avec nous, nous faisant chaque jour de délicieux repas, nous achetant des boissons et des pâtisseries, etc. A chaque fois qu'on hésitait à se resservir, le père s'exclamait "N'ayez pas honte! Il faut manger!".  La maison s'est construite en grande partie grâce au père de famille et au plus jeune fils, Luis, qui étaient chez eux pendant la construction, et dotés d'une force surhumaine. La mère de famille, Myriam, construisait également lorsqu'elle n'était pas occupée à faire à manger pour 12 personnes!

Il y a comme un malaise cependant: comment demander à une famille de se réjouir qu'on leur construise une cabane en bois ? Les familles "prioritaires" se voient assignées une petite maison en bois, très sommaire, mais quand même bien plus solide que celle qu'ils ont. Elle fait 18m carrés, et est surélevée d'une cinquantaine de centimètres pour éviter les inondations et possède un isolant thermique sur le toit pour diminuer le froid et l'humidité, à l'origine de nombreuses maladies respiratoires dans les bidonvilles. Mais c'est une maison d'urgence, prévue pour durer 10 ans: d'ici là, on espère que la famille aura eu le temps de se redresser; sinon, elle se retrouve de nouveau dans la même situation. Le plus souvent, nous ne détruisons pas la maison antérieure, surtout lorsqu'il s'agit de familles nombreuses: le but est alors de séparer parents et enfants pour réduire la promiscuité. Alors on se sent mal, presque coupables, de voir la famille nous remercier les larmes aux yeux à la fin de la construction. Je pense que, bien que la maison améliore nettement les conditions de vie, ces familles sont surtout émues de voir que quelque chose est fait pour eux, qu'il existe de jeunes volontaires qui trouvent les bidonvilles injustes et révoltants et qui s'intéressent à leurs habitants.

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 Cette expérience m'aura beaucoup changé: je comprends de mieux en mieux les mécanismes qui mènent à l'extrême pauvreté, les idées reçues sur les villas, la complexité de la pauvreté contemporaine (et la difficulté d'en sortir). J'espère, bien que ce soit une demi-goutte d'eau de bienveillance dans trois océans de misère, avoir apporté ma pierre à l'édifice pendant mon année ici. 

 

4 juin 2012

Santiago de Chile: entre cimes des Andes et smog urbain

Chers lecteurs, je sais ce vous pensez. C'est la toute fin de l'année, ils se relâchent, n'ont plus rien à raconter, se laissent aller en attendant le départ. Et bien non, non, NON ! Au contraire,  plus on voit le départ approcher, plus on se sent saisis d'une sorte de panique en pensant aux choses qu'on s'était promis de faire et que nous avons oublié de faire. Ca donne des semaines très occupés, partagés entre tout un tas d'activités anciennes et nouvelles dont nous détaillerons certaines dans un prochain article. 

Mais pour l'instant nous tenions à vous faire partager notre dernière petite escapade avant notre voyage en Colombie en juillet: quelques jours à Santiago de Chile. 

Si à première vue il y a beaucoup moins de choses à faire à Santiago qu'à Buenos Aires, la ville ne tarde pas à révéler ses trésors. C'était pourtant plutôt mal parti: nous sommes arrivés sur place avec près de 8 heures de retard après avoir tourné indéfiniment au-dessus de Mendoza, sans avoir la certitude que nous allions finalement atteindre Santiago. Au final, nous sommes arrivés et l'atterrissage était le plus beau que j'ai jamais vu puisqu'on profite d'une vue panoramique sur la cordillère des Andes enneigée.

Nichée dans un bassin, entourée par les Andes (plus exactement entre deux volcans), l'une des premières choses que j'ai remarqué à Santiago est le smog: un nuage gris de pollution qui semble recouvrir perpétuellement la ville. Si Buenos Aires est certainement une ville tout aussi voire plus polluée que Santiago, la proximité de l'Océan et le vent balaient la pollution. Santiago, au contraire, est dans un bassin, ce qui complique l'évacuation de la pollution. Mais quand ce smog se dissipe, on voit se dessiner de superbes sommets enneigés tout autour de la ville: cette proximité des Andes est incontestablement le point fort de Santiago. 

Rappel: Cliquez sur les photos pour les agrandir.

DSC00222DSC00226 On aperçoit nettement la Cordillère en arrière-plan. 

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Santiago possède plusieurs Cerros, des collines verdoyantes permettant d'avoir une superbe vue sur la ville. Depuis le Cerro San Cristobal on voit se dérouler l'ensemble de la ville, quartier par quartier (grands immeubles au Nord et au Centre, puis ça devient de plus en plus plat vers les quartiers pauvres du Sud). Le Cerro Santa Lucia, en pleine ville, offre une belle vue à 360°. Un conseil: montez au Cerro Santa Lucia au coucher du soleil! Un coucher de soleil aux couleurs andines sur une grande ville illuminée, c'est irremplaçable!

Au Cerro San Cristobal:

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 Au Cerro Santa Lucia: 

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Par rapport à Buenos Aires, Santiago fait figure de ville très propre, sûre et calme. D'ailleurs, les quelques chiliens auxquels nous avons parlé ont tous eu la même réaction quand on leur a dit qu'on vivait à Buenos Aires "Il paraît que c'est dangereux, qu'il y a beaucoup de voyous dans la rue...Ici c'est bien plus tranquille!".  

Il y a un curieux centre historique, bien moins tumultueux que celui de Buenos Aires, dans lequel édifices anciens et nouveaux coexistent harmonieusement.  

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Le Museo Historico Nacional retrace l'histoire du pays et compte plusieurs belles oeuvres, notamment de beaux dessins très expressifs et romantiques des premières expéditions au Chili. Mais arrivés à la fin du parcours, il y a comme un malaise: la dernière vitrine contient les lunettes cassées de Salvador Allende (1973), puis... rien. Désemparés, on cherche une autre salle, la salle sur la dictature, voyons!!! Elle n'existe tout simplement pas. Le musée s'arrête au coup d'Etat de 1973, et à l'entrée on trouve une curieuse plaque faisant référence à "L'excellent Monsieur Don Augusto Pinochet".  Suspect! D'ailleurs, si en Argentine le rejet de la dictature semble unanime ou presque (on trouve toujours quelques excités militaristes), il paraît qu'au Chili une certaine classe de la population (fortunée, pour ne rien vous cacher) regrette le temps de la dictature, notamment ses politiques économiques libérales. 

DSC00137 Une plaque de 1982 adressée à l'Excellent Monsieur Don Augusto Pinochet. Bizarre qu'elle n'ait pas été détruite car elle se situe dans l'entrée du musée et donne sur la rue! 

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DSC00135DSC00136Affiches témoignant de l'expérience socialiste du Chili.


Santiago possède également un Museo de Bella Artes, petit mais tout à fait digne d'intérêt. On constate que l'art chilien semble suivre la même évolution que l'art argentin à partir de l'indépendance: portraits de riches aristocrates ou bourgeois au XIXe siècle, puis enrichissement très soudain de l'art à partir des années 1870, avec incorporation et transformation des grandes tendances artistiques mondiales. 

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Une particularité que j'ai noté aussi bien à Santiago qu'à Valparaiso: la prolifération de fresques murales urbaines, "graffitis" très élaborés si on peut dire, partout dans les rues. Ca donne incontestablement aux deux villes un certain cachet! 

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Ceci m'amène à évoquer Valparaiso: c'est une des plus grandes villes chiliennes après Santiago, à une heure et demie de route de la capitale. Valparaiso jouit d'un emplacement et d'une topographie uniques puisque la ville s'agrippe à d'innombrables collines (elle est d'ailleurs toute en pentes), et se jette directement dans l'Océan Pacifique. Elle est connue pour ses maisons basses et colorées, type village de pêcheurs, qui s'amoncellent à l'infini sur les hauteurs. La promenade à Valparaiso est des plus agréables car on se laisse porter au gré de nos pas, et chaque rue semble offrir une jolie surprise. Depuis les hauteurs, on a une superbe vue sur la baie. 

Une particularité que nous noterez sur de nombreuses photos: la présence de nombreux fils électriques. En effet, ils sont si nombreux qu'il est extrêmement difficile de prendre une photo sans en avoir un (plutôt, plusieurs!) en plein dans le champ de vue.

DSC00160DSC00162 Au bout des rues et en dépit des fils électriques, devine la vue panoramique sur les collines d'un face. 

DSC00165DSC00171Juste pour illustrer mon propos sur les fils électriques! 

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 Petit aparté sur Pablo Neruda, célèbre poète chilien: nous avons visité deux de ses maisons, l'une à Santiago et l'autre à Valparaiso. Celle de Santiago a été construite pour qu'il puisse vivre avec son amante, Matilde, qu'il surnommait "La Chascona", nom que porte aujourd'hui la maison, car elle était tout le temps décoiffée (Matilde, pas la maison). La maison de Valparaiso s'appelle La Sebastiana. Dans les deux cas, on note sa passion pour la mer et les bateaux: les maisons sont construites avec des plafonds bas, des hublots, des escaliers en colimaçon... tout est fait pour qu'elles ressemblent à des bateaux! A Santiago Neruda avait même fait construire un petit canal dans sa cour pour avoir l'impression de naviguer quand il regardait par la fenêtre. On remarque également que c'était un collectionneur quasi-obsessionnel qui accumulait tout en tas d'objets curieux, c'est d'ailleurs pourquoi il est aujourd'hui aussi divertissant de visiter sa maison. Des objets bizzares du monde entier se côtoient sans complexes! On se rend également compte des liens qui existaient entre intellectuels, artistes ou militants politiques de renom du monde entier: c'est ainsi que Salvador Dali a peint un portrait de Matilde, et que Neruda recevait régulièrement des oeuvres offertes par Picasso, Léger, etc. Le monde est décidément petit comme un mouchoir de poche! 

Pablo Neruda n'était pas que poète, il a longtemps été Consul du Chili, notamment en Asie puis en France, et s'est longtemps engagé dans le Parti Communiste. C'était un grand opposant au coup d'Etat qui renversa Salvador Allende en 1973. Les militaires ont saccagé toutes ses maisons, ce qui explique qu'il manque aujourd'hui pas mal d'objets. Celle qui a le moins souffert de dégâts est celle de Santiago, car Neruda s'y trouvait à ce moment-là, souffrant d'un cancer de la prostate. Quand les militaires sont entrés chez lui, ils lui ont demandé s'il avait des armes, ce à quoi il a répondu "Oui, j'ai mes livres et un stylo.". On raconte qu'il est mort de chagrin, car peu de temps après l'installation de la dictature militaire, en 1973, il est mort d'un infarctus. 

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11 mai 2012

Arriver à Rio de Janeiro et savoir que c'est fini...

L'arrivée à Rio de Janeiro était incontestablement un moment-clé, l'étape qui devait clore ce voyage de deux mois avant le retour à Buenos Aires. Nous sommes accueillis comme des rois chez Bernard et Patricia, famille d'Eliott, que je remercie chaudement au passage. Nous logeons donc à deux pas de la plage d'Ipanema, et la mythique Rio nous attend. Nous avons la bonne surprise de retrouver Raphaël, un ami qui se trouvait là pile au même moment. 

Que dire de cette ville à la réputation sulfureuse et qui semble toujours s'amuser? Premièrement, qu'elle est certainement à la hauteur des attentes, qu'elle est l'épicentre de cet optimisme brésilien à toute épreuve et contagieux. Deuxièmement, que c'est une ville qui vit, qui vit vraiment, que ce soit au rythme du coucher de soleil rose et brumeux sur Ipanema (à ne manquer pour rien au monde, soit dit en passant!), de la frénésie du Centro ou de la samba entrainante qui émane des blocos du Carnaval. On comprend d'emblée en arrivant l'attrait irressistible de cette ville, dès qu'on aperçoit ces corps musclés et bronzés qui font leur jogging sur la baie de Copacabana, ces taxis jaunes qui envahissent les rues, ces stands de jus de fruits qui semblent attendre le voyageur assoiffé à chaque coin de rue. Il parait que les paulistas (habitants de Sao Paulo) méprisent ces cariocas qui ne pensent décidément qu'à s'amuser. Nous, on adhère!

SAM_3435SAM_3436 Ipanema.

Nous nous rendons sans plus attendre au fameux Pao de Açucar: la vue offerte sur l'étrange et célébrissime topographie de la ville est spectaculaire, mais disons-le sans plus attendre: c'est beaucoup trop cher! 53 reais (soit une vingtaine d'euros), pour monter à un point de vue en téléphérique, ça nous a surpris même après 20 jours au Brésil aux cours desquels on s'était familiarisé avec les prix brésiliens.

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Le Centro de Rio rappelle un peu celui de Buenos Aires: des bâtiments anciens, baroques, se perdent au milieu de gros buildings en verre ultramodernes, et des hommes d'affaires se bousculent, entrent et sortent des immeubles et des cafés. C'est un centre assez cosmopolite, avec ses cinémas, ses théâtres, ses grands édifices.

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Le Museu de Belas Artes est une très belle surprise. On y trouve une superbe collection permanente, avec notamment des muses aux cheveux très longs et aux immenses yeux noirs par Pedro Américo, ainsi que pas mal de tableaux représentant l'évangélisation des premiers indiens du Brésil et de très beaux portraits

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Le Christ du Corcovado est quant à lui impressionnant par sa taille et par la manière dont il surplombe Rio, bras écartés, pour en faire définitivement une ville bénie... La blague populaire aime à raconter qu'il attend que les cariocas se mettent à travailler pour joindre ses mains et applaudir. Cela dit le jour où nous nous y rendons un ciel légèrement voilé en bas se transforme en carrément nuageux en haut ce qui nous empêche de profiter pleinement de la vue. Et là aussi, 50 reais, donc vraiment trop cher!

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SAM_3465 Les mains du Christ du Corcovado font 8m de long!

SAM_3461SAM_3466 Vue sur la lagune.

Nous nous baladons longuement ensuite dans Lapa et Santa Teresa, portés par nos petites jambes et l'envie de se promener malgré la chaleur. Lapa est un quartier plutôt pauvre, assez sale et délabré mais en même pourvu d'une authenticité plaisante: on y voit par exemple de très beaux édifices, mais qui n'ont jamais été restaurés et qui gisent à l'état d'abandon, ainsi que beaucoup de graffiti et autre "urban art". L'exemple le plus connu est l'escalier-mosaïque qui regroupe des milliers de carreaux, certains vraiment uniques.  

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SAM_3491SAM_3477Voilà quelque chose qu'on ne s'attendait pas à trouver au Brésil!

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Santa Teresa est un quartier haut perché, éloigné des bords de mer, aux rues pavées aérées et agréables. On y trouve la belle collection privée d'un riche mécène brésilien.

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Nos pas nous portent à un moment vers une petite boutique des disques de bossa nova, ce jazz si beau que certains appellent l'âme du Brésil. Le vendeur ne tarde pas à s'intéresser à ces trois jeunes aux cheveux décoiffés et aux Havaianas neuves, et dans un portugais si lent et clair que nous le comprenons bien, commence à nous parler de l'essence de la bossa nova. La bossa nova n'est pas populaire, nous dit il, contrairement à la samba et à la musique du Carnaval. La bossa nova, nous fait-il comprendre, est tout en subtilités et en sous-entendus, elle ne s'offre véritablement qu'à celui qui prend la peine de bien l'écouter, de sentir son rythme doux et ses voix chuchotantes. La bossa nova, nous déclare-t-il dans un élan passionné, se mérite. Plus que le contenu de cette conversation il faut parler de la beauté de cette rencontre puisque le vendeur a passé bien trois quarts d'heure à nous passer des chansons de bossa nova et nous "faire sentir l'âme de la musique". Et ça a marché, depuis, nous sommes des fans  de bossa nova et écoutons avec plaisir ces chansons de Joao Gilberto y Jobim, et la douce voix qui entonne la Garota de Ipanema.

Nous avons profité de notre séjour à Rio pour faire un tour à Paraty, un tout petit village colonial à 5H de Rio, réputé pour ses belles plages. C'était une halte bien agréable, bien que je trouve que les guides de voyage en font trop en qualifiant Paraty de "petit paradis" ou en vantant son architecture coloniale. En fait c'est un petit village aux basses maisons blanches, mignon mais pas remarquable. Et s'il est vrai que les plages à proximité de Paraty sont belles, je ne dirais pas qu'elles sont plus belles que celles de Rio. C'était toutefois bien reposant!

SAM_3522SAM_3523 Ca bosse dur!

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SAM_3518 Baignade bien agréable dans une petite cascade. 


Une petite anecdote rigolote avant de clore l'ensemble du récit sur ce voyage. Pour rentrer au village depuis cette petite cascade, un couple de brésiliens nous proposent de monter à l'arrière de leur pick-up. Ils sont du genre cool, musclés et portent l'afro. A un moment, sur la route déserte, le véhicule s'arrête au bord de la route. En plaisantant entre nous, nous disons "Haha, c'est là que le gars il sort un machette, haha!". Et LA, le conducteur sort de la voiture, avec... UNE IMMENSE MACHETTE! Sursauts et panique, jusqu'à ce qu'on se rende compte que les coups de machette ne nous étaient pas destinés. Le meurtrier présumé s'est dirigé vers un grand bananier pour couper une grosse grappe de bananes. Et nous sommes rentrés sains et saufs.

30 avril 2012

Le BAFICI et autres festivités...

Bonjour, bonjour,

Le temps d'un article, laissons de côté les voyages, le Brésil, et le soleil, pour se reconcentrer sur l'Argentine en elle-même, et sur notre vie ici à Buenos Aires, qui, j'en suis sûr, en passionne plus d'un.

Car depuis notre rentrée à Buenos Aires, "à la maison", nous n'avons pas chômé ! Enfin, un peu en fait, puisque malheureusement, nous ne travaillons pas autant qu'au premier semestre, et ne pouvons plus nous permettre des folies, du genre aller au restaurant plus d'une fois par semaine. Surtout ça en fait. Mais on se console en allant manger les fameuses brioches de la pâtisserie d'en face, qui constituent un bonheur hebdomadaire, et en dépensant les calories accumulées par la dégustation de ces mêmes brioches au gimnasio du coin.

Tout de même, nous avons pu partir pour Cordoba le mois dernier, ville très marquée par la présence des jésuites il y a deux siècles. C'était très sympa, mais ce n'est pas vraiment de cela que je voudrais parler dans ce post, cela fera l'objet d'un autre article.

Mais de quoi alors ? Principalement du BAFICI, le Festival international du cinéma independant de Buenos Aires. Pendant une dizaine de jours (du 11 au 22 avril dernier), cinq ou six cinémas ont ainsi projeté plus de quatre-cents films, venus de tous les horizons, de tous les pays et de tous les genre. L'occasion pour nous, qui attendions ce festival depuis longtemps, de découvrir des films étonnants, choquants, émouvants, ennuyants parfois, mais surtout, de voir des films qu'on ne verrait jamais ailleurs. Le Festival se décompose en une dizaine de sections. Il y a la compétition internationale, la compétition argentine, la compétition de courts-métrages, et ensuite de nombreuses autres, allant de la rétrospective sur un auteur en particulier, à une compilation de films sur un même thème. De nombreux films argentins évidemment, mais aussi des films français (Tomboy, L'Apollonide: souvenirs de la maison close), suisse, brésilien, cambodgien, chinois, etc.

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Puisque je sais que ça vous intéresse, un petit point sur les films que nous avons vu. Car sur une dizaine de jours de festival, nous avons vu... dix films, soit un film par jour, tous projetés au cinéma du centre commercial d'Abasto (dans le quartier Once), temple du consumérisme, de la mal-bouffe et du McDo Kasher. C'est d'ailleurs dans ces endroits-là que les contrastes et les inégalités argentines frappent avec le plus de force. 

10 films donc, répartis sur une semaine. Il faut savoir que la sélection était difficile : la plupart des films nous étant largement inconnus, nous avons choisi au hasard parfois, fonction de ce que le titre ou le synopsis nous évoquaient..

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A Lorient, Camille, tombe enceinte. Pour ne pas être seule, elle va convaincre ses amies du lycée, puis d'autres, de faire la même chose pour qu'ensemble, elles puissent construire un nouvel avenir et une autre vie, différente de celle qu'elles constatent être celle leurs parents. Le film que réalisent Delphine et Muriel Coulin est éminemment politique. Pas parce qu'il évoque la contraception ou l'avortement (qui ne sont de toutes façons jamais questionnés ici), et pas seulement par tout ce qu'il touche en filigrane (la guerre en Afghanistan, le sort des anciennes villes industrielles comme Lorient, où les jeunes font des soirées dans les vieux bunkers), mais parce qu'il filme le développement d'un espoir, d'une nouvelle vision du monde. Chacune de ces 17 filles ne se bat pas pour la même raison, mais toutes, ensemble, ont l'envie (la prétention, ou la bêtise diront certains, ces "adultes" qui ne les comprennent pas) de construire une nouvelle société, qui leur permettrait de faire un enfant à 17 ans, et de profiter de leur jeunesse plus tard. Une nouvelle société sans hommes, relégués au simple rôle de "donneur", et qui divisent plus qu'ils ne rassemblent quand ils réapparaissent en tant qu'amant. Construit comme une fable, c'est là que le film pêche, à mon sens. La fin ressemble presque à une leçon de morale, et c'est ce manque de recul et de perspective vis-à-vis de ces filles et de leurs actions qui fait perdre, selon moi, au film un peu de sa justesse et de sa finesse.

 

Low Life

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Un autre film français, plus particulier celui-là. Un groupe de jeunes bourgeois s'est réuni pour aider les immigrés clandestins contre la police, et pour régler leurs problèmes avec la vie, avec l'amour et l'amitié. Low Life est un véritable film de Résistance, une Résistance au même sens que celle qui existait durant la 2nde Guerre Mondiale, cette fois ci composée de jeunes bourgeois qui cherchent un sens à leur vie en tentant d'en sauver d'autres. Les analogies à la Seconde Guerre Mondiale ne manquent d'ailleurs pas (l'afghan immigré obligé de se réfugier dans une chambre "secrète", dont la porte est dissimulée derrière une armoire, les références explicites à la Gestapo ou à l'Occupation, etc). Le film dépeint une France en pleine guerre civile, où la Police n'est plus que l'instrument de la xénophobie d'Etat, et c'est là qu'il est le plus fort. Nécessaire et saisissant, il pousse quasiment à prendre les armes. La musique, enivrante et hallucinée, se mêle aux scènes carrément mystiques durant lesquelles les immigrés effectuent une sorte de cérémonie vaudou autour de leur Lettre d'Expulsion du Territoire Français. Cette lettre, c'est "l'arrêt de mort", celui qui la porte connait inévitablement un destin fatal. La caméra se fait lente, ralentie, fluide mais destructrice. Malheureusement, à côté de cela, le film s'évertue à décrire les relations amoureuses entre tous ces jeunes déjà condamnés, et alors, la théâtralité du jeu et des dialogues, le vide de ces paroles clamées comme si elles étaient une poésie maudite posent une distance certaine entre le spectateur et ce qu'il voit au point que le ridicule n'est jamais très loin. Il est difficile de rentrer dans ce film, mais difficile ensuite d'en sortir.

Douch, le maitre des forges de l'enfer

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Douch est l'homme derrière la prison S21centre de torture et de mort durant le règne des Khmers Rouges. Ce seul centre a fait plus de 12 000 victimes, goutte-d'eau dans l'océan d'un régime qui en a fait 3 millions (plus d'un quart de la population). En 2009, Douch est jugé au Cambodge pour ses actions. Rithy Panh y voit alors une opportunité pour filmer et interviewer. Plus de 300 heures d'interviews ont donc été ramenées à 2, durant lesquelles Douch se révèle devant la caméra du réalisateur. Difficile de condenser ces deux heures d'interviews en quelques lignes, mais il est indéniable que le documentaire choque. Alors qu'on s'attend à un véritable monstre, un homme prêt à détester, on se retrouve devant un homme cultivé, citant Weber ou Paul Valéry en français, et analysant le régime khmer-rouge "de l'intérieur". Douch est responsable de la mort de milliers de personnes : dans le discours khmer-rouge, il s'agit moins de tuer que d'effacer et d'anéantir (le corps, l'image, le souvenir) afin d'éliminer l'ancien peuple, et le remplacer par le "Nouveau Peuple". Lui, Douch, n'a jamais tué personne : il plaint autant "ceux qui ont été tués, que ceux qui ont tué". Il regrette ce qu'il a fait, et pourtant, nous montre fièrement les archives où sont listées les personnes qui ont été torturées dans sa prison puis tuées. Tout aussi fièrement, il nous explique le fonctionnement de la prison : à quel moment il décidait d'anéantir une personne, ou au contraire de la garder pour encore un interrogatoire. Où était disposés les corps, ce qu'il en restait. Qui prenait les décisions. C'est lui, il est fier de son travail. Il dit n'avoir jamais torturé personne, d'autres ont d'autres souvenirs. Ce n'est pas seulement la "banalité du mal" que l'on voit devant nos yeux, c'est le rouage qui fait fonctionner le mécanisme du mal et qui l'accélère : il ne répondait pas seulement aux ordres, il y croyait. Le résultat, c'est l'anéantissement total de l'humain et de son individualité. J'en parle mal, mais on ressort du film assez lessivé: l'humain n'a décidément aucune valeur.

The International Sign for Choking


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Bon, ce film là ne vaut pas vraiment la peine qu'on s'y attarde à mon avis. Réalisé par un américain, il raconte l'histoire d'un américain (le même) qui vient à Buenos Aires en principe pour écrire un scénario, mais en vérité pour retrouver une fille. La mise en scène cherche, à l'aide d'une faible profondeur de champ qui progressivement s'agrandit, à faire comprendre que ce mec est incapable de se créer une vie sociale, de s'adapter à la société, et est profondément seul. Bon. L'idée est usée jusqu'à la moëlle, puisqu'il semble n'y avoir qu'elle dans le film. Toutes les pistes lancées par le scénario sont abandonnées rapidement et on ne saura rien, ni sur la fille, ni vraiment sur le scénario, ni vraiment sur la romance qui lie le personnage principal à sa voisine. A force de couper toutes les scènes avant que quelque chose d'important ne soit dit, a force de ne rien dire pour faire comme si on disait quelque chose, le film ne raconte rien. Des personnages décadrés, des long silences, pour ne rien développer au final... Et puis Buenos Aires n'est même pas filmée.

Un Amour de Jeunesse

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Encore un film français ! Un beau film, un peu long par moments, mais touchant et juste, merveilleusement émouvant sur ce thème pourtant traité à de maintes reprises déjà qu'est le premier amour. Un amour dont on ne guérit jamais vraiment est dépeint, mais aussi un amour terriblement formateur et déterminant, auquel on pense toujours avec un pincement au coeur et une grande nostalgie. Un beau film, en bref. 

Urgent ou à quoi bon exécuter des projets puisque le projet est en lui-même une jouissance suffisante

 Alors là... Probablement la séance de cinéma la plus particulière de ma courte vie. J'avais choisi ce film sur son titre, que je trouvais particulièrement intéressant. Bon, j'entre dans la salle, quasi pleine d'ailleurs, le film commence... La musique d'abord (du rock des années 50-60, je crois), puis l'image...  Et là on entre clairement dans un autre monde. C'est une femme, qui fume au bord d'une fenêtre, à Paris, on imagine. Pas de son interne, juste la musique. La chanson se termine. L'image filmée reste. Une nouvelle chanson : une autre image. On ne peut pas parler de scène puisqu'il n'y a pas d'action, pas de séquences, pas de lieu... Ce n'est pas un documentaire non plus, puisque rien n'est raconté. Juste des images filmées qui se succèdent, décalées avec la musique qui semble avoir une espèce de vie propre dont on ne comprendrait pas le sens. Parfois, on voit quelqu'un, qui semble être professeur ou philosophe, parler face caméra, on ne l'entend pas, seulement la musique. Une autre fois, c'est un concert qui est filmé, le chanteur en gros plan, sans son, juste la chanson externe, qui n'a rien à voir. L'image se distord, les couleurs se mélangent, sur une même image, la partie gauche verte, la droite est jaune, et ça change indéfiniment. Parfois, une sorte de cercle blanc apparait sur l'image, puis plusieurs fois très vite, ça clignote, ça fait mal aux yeux

Après une demi-heure, on a arrêté d'essayer de comprendre. La moitié de la salle est déjà partie, et le reste a laissé tomber ses pop-corns. Car le plus drôle c'est de faire attention aux réactions totalement désemparées des spectateurs dans la salle, de voir ces gens qui sont entrés avec leur nachos et leur pop-corn et qui doivent se demander, comme tout le monde, ce qu'ils foutent là. Le contraste est assez comique. Au bout d'une heure, le réalisateur a clairement abandonné les images : il n'y a plus que la musique (quasiment l'intégrale des Velvet Underground) et de temps en temps, une image, incompréhensible, comme une fulgurance ou une réminiscence de ce que nous pensions être le cinéma, mais ne l'est plus vraiment.

Le réalisateur est français, il s'appelle Gérard Courant : il a aussi réalisé le Cinématon, le film le plus long du monde, en perpétuel développement puisqu'il est constitué de portraits très courts de personnages connu du monde des arts, des portraits muets, de 3 minutes, durant lesquelles la personne filmée est libre de faire tout ce qu'elle veut... Vous pouvez en voir quelques uns sur le site du cinéaste si ca vous intéresse.

Le Rapport Karski (et Esas Voces que Curan)

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Nous étions venu voir le Rapport Karski, nous avons finalement vu deux documentaires.

 

 

 

Le premier "Esas Voces que curan", suit une femme dans la jungle péruvienne : elle est chaman, et guérit grâce à la drogue de la forêt amazonienne : l'ahayuasca (pour ceux qui suivent : celle dont nous avions entendu parler à Puerto Maldonado et qui permettait de guérir de l'addiction à l'alcool apparemment... On regrette d'autant plus de ne pas avoir essayé!), et grâce à ses chansons. Cette femme est chaman parce que sa mère l'était, et sa grand-mère etc : c'est de famille. Elle est atteinte d'un cancer cervical, et tente à la fois par le biais de la médecine "normale" et des médecines "traditionnelles" de se guérir. Mais l'intérêt du documentaire porte plutôt sur la manière de vivre en perpétuant des traditions ancestrales dans cette famille qui réussit le difficile pari de préserver sa particularité culturelle, et mieux encore, d'en comprendre le sens, sans pour autant rejeter la modernité, puisque la chaman a recours a la médecine "normale" également, le tout dans un monde menacé d'uniformisation. Documentaire carrément rafraichissant même si je me suis un peu assoupi (haha).

 Nous étions surtout venu voir le Rapport Karski, de Claude Lanzmann. Le documentaire était très intéressant puisque c'est la version longue de l'interview de Ian Karski, membre de la résistance polonaise qui écrivit un rapport sur l'extermination des juifs en Pologne, et qui fut reçu par Roosevelt pour en parler... mais n'en parla finalement pas tant que ça. Ce que raconte Ian Karski, c'est comment il fut reçu, comment il ne fut pas cru : pas parce qu'on pensait qu'il mentait, mais parce qu'on ne le "croyait pas". La phrase de Raymond Aron, citée en exergue du documentaire, résume tout : alors qu'on lui demandait s'il avait eu connaissance de l'extermination des juifs durant la guerre, il avait répondu "J’ai su, mais je ne l’ai pas cru, et puisque je ne l’ai pas cru, je ne l’ai pas su". Le documentaire de Lanzmann (une très longue interview de 40 min en fait) pose la question de l'information, de ce que c'est que de savoir. La Shoah peut elle être "comprise" par l'Humanité, ou bien ne rentre-t-elle pas, comme l'explique Karski, dans notre "champ de conscience" ?

La Araña Vampira

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Film argentin, qui a gagné le prix du meilleur film argentin au sein de la compétition internationale, qui vaut vraiment la peine d'être vu. Le personnage principal (Jeronimo) est en voyage avec son père, ils sont allés passer quelques jours dans une maison dans les bois, dans les environs de Cordoba, pour calmer les crises d'angoisse de Jeronimo. On comprend assez vite que quelque chose ne va pas avec la mère, mais on ne saura pas vraiment quoi. Entre le fils et le père, la communication passe mal. La première nuit, Jeronimo se fait piquer par une énorme araignée... A l'hopital, on lui dit que ce n'est rien, mais les gens des bois, les "locaux" lui expliquent : il a été piqué par "l'araignée vampire" : s'il n'est pas piqué de nouveau par une araignée du même genre, il va mourir. Jeronimo va donc devoir suivre un espèce d'illuminé dans les bois et dans les montagnes pour retrouver ces fameuses araignées. Sur cette base étrange, le film développe une quête éperdue pour retrouver la vie, et retrouver du sens. Le film se divise clairement en deux parties : la première dans la cabane, et la deuxième dans les montagnes, à la recherche des araignées. Tout le film est une sorte de rite initiatique aux accents surnaturels, un rite où Jéronimo doit laisser derrière lui son père, la justice, son guide... Se sacrifier, pour pouvoir survivre et donner un sens à sa vie. En quelques mots, c'est un beau film, sur le sacrifice, sur la famille aussi, et sur le passage à l'âge adulte... Il y a toutefois quelques maladresses (le personnage du guide totalement fou est insupportable et n'apporte pas grand chose), mais une vraie vision et une vraie croyance en ses personnages qui est belle à voir.

L'Apollonide, Souvenirs de la maison close

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Je n'écrirai pas beaucoup sur ce film, parce que sur internet on trouve des tonnes de choses et que j'ai déjà trop écrit sur les autres, mais c'est probablement le film le plus marquant que nous ayons vu durant ce festival. Triste, fascinant, envoutant, politique, L'Apollonide est tout cela à la fois. Il nous fait entrer dans une maison, dans cette société où chaque prostituée se bat contre sa condition, ne l'accepte jamais vraiment, où même Madame (la tenante de la Maison Close) doit lutter pour survivre et pour faire vivre ses deux enfants, et où chacune meurt un peu plus vite. L'immersion au sein de la Maison Close est totale, on n'en ressort que bouleversée, ou bien défigurée. Techniquement, le film est magnifique, et les actrices parfaites. Parfois le film devient horreur, parfois il devient comédie : L'Apollonide mélange tous les genres de la même manière que les prostituées se mêlent aux aristocrates (pas seulement de simples clients, mais des être humains) dans le petit salon, et recréent le monde de l'extérieur, ou que les temps, passé, présent et futur, se rencontrent. Il ressort de tout cela un malaise latent (comme dans cette scène où une des prostituées, Léa, doit "faire la poupée"). Et puis un lieu, la maison close, qui renferme tous les espoirs et les désespoirs de l'humanité et de tous les temps. Le film se termine sur une curieuse scène qui interpelle le spectateur puisqu'un des personnages principaux, la prostituée Clotilde, est transposée aux temps modernes, et on la voit descendre de la voiture d'un client Porte Maillot, et recommencer à guetter le client parmi des autres prostituées, au bord de la route. Alors, pour ou contre les maisons closes? L'Apollonide ne livre pas de réponse facile mais nourrit superbement le débat.

Bon bon voilà. Je pensais pas que j'écrirai un truc aussi long qui me prendrai tma journée, du coup on parlera de notre maison, et de tout plein de chose la prochaine fois ! Enfin non, car la prochaine fois, retour à Rio !

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26 avril 2012

Le Brésil n'est pas qu'une grande plage.

Avant de me rendre au Brésil, j'avais une image assez stéréotypée de ce pays: plages, jungle, plages. En fait, je n'avais que peu pensé au fait que le Brésil avait en son intérieur des terres qui regorgeait de choses à voir. Pour moi, le Brésil se résumait plus ou moins à la côte, une longue, longue, bande de sable blanc, et à la région tropicale, amazonienne. Mais nous n'étions pas au bout de nos surprises.

Après cette courte semaine passée entre Salvador et Mangue Seco, nous ne sommes pas tout à fait prêts à quitter l'Etat de Bahia. C'est pourquoi nous choisissons d'y rester deux petits jours de plus, mais dans une tout autre ambiance puisqu'on quitte la côte pour s'enfoncer dans les terres. On se retrouve dans le petit village de Lençois. Ce charmant petit village est une halte bien reposante puisqu'il est à la fois très tranquille et qu'il y a beaucoup de petites infrastructures pour touristes: petits restaurants vraiment délicieux, petites auberges familiales bien tenues, etc. L'endroit a aussi une petite touche hippie sympathique: restaurants où l'on choisit l'album de jazz que l'on veut écouter en mangeant, restaurants végétariens...

A la base je prête peu d'importance à tout cela mais dans le cas de Lençois je dois dire que c'est réussi: le village semble regorger d'offre (activités, bouffe...) de toutes sortes, mais n'est absolument saturé par le tourisme comme c'est le cas, par exemple, de San Pedro de Atacama, dans le Nord du Chili. Les structures d'accueil pour touristes sont restés totalement respectueuses du village, par leur taille et leur nature. 

SAM_3358SAM_3359 Drôle de chat dans un drôle de décor!

Nous arrivons sous la pluie à 4h du matin. A l'arrêt de bus nous attend Rita, la propriétaire de la pousada familiale dans laquelle nous avions réservé. Grosse femme noire à la fois maternelle et autoritaire, elle est une figure amusante, et impressionnante : elle ne s'est pas arrêté de travailler depuis le moment où elle est venue nous chercher (4H du matin quand même) ! Faire les chambres, nettoyer le sol, faire le linge, gronder ses enfants et surtout préparer de succulents gâteaux maisons, pains salés et jus de fruits frais pour le petit déjeuner... Une force de la nature, cette Rita. 

Mais on ne vient pas à Lençois pour le village en soi sinon pour la nature exubérante qui l'entoure: une profusion de grottes, de cascades, de petits lacs. Nous profitons de cette première journée pour se balader dans les alentours immédiats de Lençois. A une heure de marche on tombe sur ce lac aux eaux fraîches et obscures et sur ce toboggan naturel, le tout parsemés de nombreux rochers pour se faire dorer au soleil. 

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Le lendemain, nous faisons davantage la connaissance des environs: le contraste entre les lacs aux eaux foncées, les lagunes aux eaux turquoises tranquilles et les cascades bruyantes et rafraichissantes, est saisissant. 

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La journée se termine par l'ascension du Morro do Pai Inacio (Mont du Père Ignacio), ainsi nommé en référence à un esclave noir ayant eu à l'époque coloniale une liaison avec une blanche, fille d'un colonel. Evidemment Ce genre de liaison était inacceptable à l'époque: un autre esclave aurait rapporté au colonel, qui, hors de lui, aurait poursuivi Inacio jusqu'à ce Mont. En possession d'un parapluie offert par son amante, Inacio aurait pu sauter de ce Mont, survivre, et s'enfuir. L'histoire dit que les amants se seraient rejoints en Europe où ils auraient vécu heureux. Cette conclusion à l'histoire est un peu improbable, mais on dit aussi que bien des années plus tard, en voulant construire une nouvelle route de terre, des hommes envoyés par le gouvernement seraient tombés sur une petite cabane très isolée, dans laquelle vivaient un très très vieil homme... nommé Inacio

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Nous quittons Lençois pour continuer notre périple dans les terres vers la région du Minas Gerais (Mines générales), la région où étaient exploitées des mines d'or et de pierres précieuses pendant l'époque coloniale. C'était une région d'enrichissement très rapide, ce qui explique sa richesse en architecture et art colonial, puisque, enivrés par la fièvre de l'or, les colons portugais y ont construit une multitude d'Eglises baroques.

Nous arrivons bien fatigués puisque notre bus était tombé en panne en pleine nuit et que nous avions dû en attendre un autre deux heures au bord de la route, pile dans ce qui est certainement l'endroit le plus infesté de moustiques du monde (c'est en tout cas la sensation que j'avais). Après une correspondance à Belo Horizonte, capitale du Minas Gerais et ville qui nous a semblé particulièrement moderne et fonctionnelle, nous voilà à Ouro Preto (Or Noir), principal point d'intérêt touristique de la région. 

 Nous arrivons là-bas lors du dernier jour de Carnaval, ce dont nous nous serions bien passés car la plupart des musées et des eglises sont fermés et les hordes de beaufs qui se renversent de la bière dessus dans les rues se marie très moyennement avec le charme historique de cette ville coloniale aux mille Eglises et aux rues pavées et pentues. Mais on se console en goûtant aux spécialités culinaires de la région: une bonne cuisine, mais lourde et rustique, et le soir l'animation est bien sympathique, beaucoup plus détendue que lors du Carnaval de Salvador : on danse dans la rue sur une musique de carnaval populaire, à l'inverse de l'esprit de spectacle. 

430301_10150591026825954_733355953_9196252_1390643970_nTenez vous bien, ce n'est que l'entrée.

Voyage_janvier_f_vrier_2012_511 Et voici le plat! 

Voyage_janvier_f_vrier_2012_512 Je vous l'accorde: ces desserts ont l'air franchement mauvais. Pourtant, ce n'était pas mal! 

La ville est tout en collines et la vue d'ensemble est sublime: des Eglises perchées haut sur des collines verdoyantes s'étendent à perte de vue.

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On arrivé tout de même à visiter la Igreja Nossa Senhora do Pilar est étonnante de par sa forme décagonale. On dit que 430 kilos d'or ont été utilisés dans sa décoration (cf. les chérubins en or massif). C'est une très belle Eglise, les décorations y réussissent le dur pari d'être à la fois fastueuses et élégantes, ce qui est plutôt rare dans le baroque brésilien: ce sont des motifs en or sur une base bleu passé. 

Le lendemain, le Carnaval est fini, et nous sortons tôt, anxieux de découvrir la ville. Nous avons la ville pour nous, et notre promenade nous mène vers les Eglises plus excentrées. La Igreja Santa Efigênia, construite par les esclaves et pour eux, possède une belle façade et surplombe fièrement un quartier populaire tout aussi décrépi qu'elle, mais pas dénué de charme, bien au contraire. La Capela do Padre Faria est la plus ancienne de toutes, minuscule et banale de l'extérieur mais vantant un riche autel couvert de dorures à l'intérieur. 

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 Voyage_janvier_f_vrier_2012_528Voyage_janvier_f_vrier_2012_529Petit chemin fort sympathique

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Voyage_janvier_f_vrier_2012_532Voyage_janvier_f_vrier_2012_538 Santa Efigênia.


Nous poursuivons la balade: 

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Le Museu de l'Inconfidência est un excellent musée qui retrace l'histoire de la ville, de ses mines d'or, de ses esclaves, en passant par sa vie mondaine, sociale et intellectuelle, en passant par l'Inconfidência, c'est à dire la Conspiration qui a secoué Ouro Preto en ... 1789 ! C'est une conspiration qui a eu lieu contre la couronne portugaise, en partie sous l'influence des Lumières et de la Révolution française, comme un prélude à l'indépendance du Brésil. Les conspirateurs protestaient contre le prélèvement abusif d'impôts de la part d'une couronne inquiète de la rapide raréfaction de l'or dans la région. Mais la rébellion fût décapitée, et son leader, Tiradentes, pendu en place publique. Beaucoup d'autres ont été bannis, notamment dans d'autres colonies portugaises comme le Mozambique ou l'Angola. 

L'Igreja Nossa Senhora do Carmo est très belle de l'extérieur et de l'intérieur, dans un style raffiné rafraichissant. Le Museu do Oratorio qui la jouxte est bien plus intéressant que ce qu'on aurait pu imaginer: on y voit toutes sortes d'oratoires curieux et jolis, qui aident à comprendre l'importance de la religion, et surtout de l'imagerie religieuse, dans la conquête et l'évangélisation du Brésil

Le dernier matin, avant de quitter Ouro Preto nous visitons deux Eglises: Sao Francisco de Assis, dont certains disent qu'elle est la plus belle de la ville, est une chef d'oeuvre de l'Aleijadinho, ce célèbre sculpteur ayant progressivement perdu ses mains en raison d'une maladie, et sculptant en attachant ses outils à moignons! On y trouve beaucoup de dorures luxueuses, et un superbe ange qui attire vraiment l'attention au plafond de la nef centrale. Nossa Senhora de Conceiçao, dans un tout autre style, présente des dorures plus lourdes et chargées, assez roccoco, très noircies par le temps mais dont on imagine aisément ce luxe époustouflant qu'elles devaient constituer. 

 Voyage_janvier_f_vrier_2012_554 Sao Francisco de Assis.


16 avril 2012

A la rencontre des bahianais

Après un passage express à Rio Branco, où nous nous frottons pour la première fois aux prix brésiliens, nous partons en avion pour Salvador de Bahia. Nous sommes un peu appréhensifs car Salvador connait pile à ce moment là une grande grève de la police au cours de laquelle la criminalité et la violence ont explosé (+130% d'homicides). A en écouter les médias, la ville est livrée à l'anarchie.

Notre premier jour se passe pourtant dans le calme, dans une chaleur moite étouffante et sous un soleil brulant. Nous nous promenons dans le Pelourinho, le centre historique et sommes d'emblée sous le charme  de ces maisons coloniales aux tons pastels. Les rues pavées sont étroites, pentues et tournicotent dans tous les sens.

Cliquez sur les photos pour les agrandir.

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SAM_3288SAM_3228 Moi et ma coco.

SAM_3229SAM_3232 Cette majestueuse Eglise tout bleue a été construite par et pour les esclaves; à l'intérieur tous les saints sont noires et il parait que les messes y ont encore quelque chose de  très syncrétique.

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Si dans la partie centrale, tout est bien propre et rénové, on tombe en s'éloignant de quelques rues sur des façades décrépies et décaties mais encore plus charmantes car plus authentiques. Mais c'est aussi ainsi que l'on se rend compte de la grande pauvreté de nombreux habitants de Salvador.

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L'Igreja Sao Francisco nous offre à voir une version assez extrême du baroque brésilien. Si l'extérieur est plutôt sobre, l'intérieur est très curieux: recouvert de moult dorures, de cherubins sculptés, de motifs floraux, d'oiseaux. Le tout est si chargé que l'on a bien du mal à savoir si l'on aime ou si l'on déteste. 

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SAM_3270 Ces fresques en céramique bleue et blanche sont très répandues au Brésil: on les appelle azulejos. Ils ont souvent une portée didactique: ils représentent des scènes de la Bible et de l'histoire brésilienne. 

SAM_3273 Vue sur la baie de tous les Saints


Le soir même nous avons l'occasion de voir un bloco du Carnaval s'entrâiner. Olodum est un groupe super connu au Brésil, et on comprend pourquoi! Les rythmes puissants et entrainants des percussions nous ont fait danser toute la soirée. Tous les mecs du groupe ont noirs, bodybuildés, ont des piercings... bref ils sont intimidants! Mais leur énergie est absolument contagieuse et nous a vraiment mis dans l'ambiance du carnaval qui allait débuter dans quelques jours. 

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Le lendemain nous avons mangé à Senac, l'école hôtelière de Bahia. Un conseil, si vous êtes à Salvador, allez-y! C'est un excellent restaurant qui sert un buffet à volonté de spécialité bahianaises merveilleusement bien préparées. Les serveurs sont des élèves en hôtellerie, attentionnés et adorables. 

La cuisine bahianaise et à l'image de l'Etat de Bahia lui même: colorée, relevée, variée, sucrée. Les épices et lait de coco sont à l'honneur, ainsi que les fruits de mer

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SAM_3294 Cette photo est floue, je sais, mais géniale quand même.


Le soir-même nous assistons à une cérémonie de candomblé. Quézaco? Le candomblé est un rite religieux importé d'Afrique (Angola et Nigeria essentiellement) par les esclaves. Aujourd'hui, il est beaucoup plus pratiqué au Brésil qu'en Afrique et fait partie intégrante de la culture afro-brésilienne. En quoi ça consiste? Basiquement, les pratiquants se réunissent pour laisser les divinités les posséder, entrer en elles, dans un étrange rite qui a quelque chose d'expiatoire, de cathartique. Les participants, en tenue traditionnelle, font d'étranges danses sur un rythme enivrant et hypnotisant... Peu à peu, elles se laissent "posséder".

Au début de la cérémonie on ne se sent pas vraiment à notre place: tous se saluent et mangent entre eux (de l'acarajé et du vatapa dans une grande feuille de bananier!), bref on a l'impression d'être à une réunion de famille, ou à la bar-mitzvah de Kirikou. Mais ensuite, la cérémonie commence vraiment et on voit plusieurs personnes entrer dans d'étranges transes: dans une chaleur accablante, ils tremblent, tombent parterre, pleurent, crient... C'est très impressionnant et qu'on y croie ou pas, ça donne la chair du poule et ça donne une idée de la complexité de l'identité et de la culture brésiliennes tellement le métissage est total dans ce pays. 

Nous avons également eu la chance d'assister à une journée de Carnaval à Salvador de Bahia. C'était génial mais suffisant car pour les non-initiés, le rythme est vraiment drainant. En effet, on débarque après deux jours passés ailleurs dans l'Etat de Bahia (j'y reviendrai). A l'aube, le terminal de bus est déjà grouillant de monde. L'agitation est palpable mais le centre-ville encore très calme. L'animation débute doucement en début d'après-midi, dans une ambiance très bonne enfant. Nous nous promenons en regardant les différent blocos, il y a beaucoup d'enfants dans les rues. Des fanfares populaires défilent joyeusement et tous dansent la samba.

Mais nous n'allions pas tarder à voir en quoi l'ambiance peut basculer en quelques instants pendant le carnaval. Des blocos sur de grands camions défilent, et les travestis débarquent (il est très courant de se travestir pour le Carnaval) et deviennent très vite majoritaires. Il y a beaucoup de batailles d'eau et de mousse, d'abord innocentes puis de plus en plus agressives, et les jeunes filles dans la rue de livrent à des concours de booty-shake qui feraient pâlir Shakira et Beyoncé. Les travestis exposent leurs strings et l'alcool coule à flots. Les insinuations sexuelles ne manquent pas. La foule est très compacte et on peut à peine bouger, on est bousculés dans tous les sens: c'est la folie du Carnaval que nous vivons. Nous profitons bouche-bées de l'agitation mais quand les travestis sortent d'énormes pénis en plastique et nous tapent avec, on se dit qu'il est peut être temps de se rediriger vers une zone plus calme car on n'a plus aucune prise sur la situation. Il nous fût très difficile de nous extraire de cette foule, mais en manquant de nous faire arracher quelques membres on y arrive, et on en ressort épuisés, égratinés mais grisés. Malheureusement c'est ce jour que mon appareil photo a choisi pour tomber en panne, donc je n'ai pas de photos. Mais quelque part, heureusement que je n'ai pas essayé d'en prendre, car je me le serais certainement fait voler. 

L'Etat de Bahia nous réservait bien d'autres surprises que Salvador. A cinq heures de route magnifique bordée de cocotiers au Nord de Salvador se trouve Mangue Seco, un véritable petit paradis. On y accède assez difficilement, par une habile combinaison bus+ taxi+ bateau. Mais cela en vaut largement la peine: ce sont des plages paradisiaques de sable blanc, de mer chaude, de bonnes vagues et d'immenses cocotiers

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SAM_3329SAM_3345 Moi et ma coco bis.

SAM_3327 Méduse très bizarre! 

Il n'y a que très très peu de touristes à Mangue Seco, et on profite de cette halte au calme pour se baigner dans ce qui est incontestablement la plus belle plage que j'ai vu de ma vie. 

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La plus belle surprise de l'Etat de Bahia, c'est indubitablement les bahianais. Bahia est une région à la grande majorité noire ou métisse. Le métissage y est si complet qu'on voie des métisses aux cheveux blonds mais crépus, des noirs aux yeux bleux, aux cheveux lisses, des blancs aux cheveux crépus... C'est assez incroyable. C'est aussi une population incroyablement douce et gentille, toujours en train de rire ou sourire, comme imbibée de soleil et de sucre, mais qui connait aussi une part de violence et d'ombre (favelas, drogue, délinquance...). C'est une population qui conserve de fortes traditions afro, et sui se situe quelque part entre religiosité et décadence. Difficile de ne pas être séduit! 

SAM_3245 Un groupe de jeunes bahianais qui se travestissent pour faire la fête. même les petits garçons revêtent des bikinis de petite fille: c'est leur manière de se déguiser!

SAM_3248 Religieux brésiliens. 

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7 avril 2012

Les imprévus: ne jamais atteindre Ayacucho, et savoir résister à l'Ayahuasca

Nous avions prévu, après le Machu Picchu et avant le Brésil, d'aller connaître la ville d'Ayacucho: il parait que c'est une petite ville coloniale encastrée dans les montagnes, aux nombreuses Eglises et encore très peu connue au niveau touristique. Le fait que cette ville soit le berceau du Sentier Lumineux n'y est peut être pas pour rien...

Les billets étaient pris, mais nous n'avons jamais pu partir. En effet, ça commençait déjà pas fort: on découvre en arrivant au terminal de bus de Cuzco un bus sale et puant, dans lequel on s'entasse parmi des péruviens et leurs enfants. On est les seuls touristes et on attire quelques regards curieux. On se dit que ça va être très TRES long, 20H de voyage dans ces conditions: on n'a aucun espace et l'odeur frôle l'insupportable.  Mais pour le meilleur ou certainement plutôt pour le pire, le bus démarre. Au bout de 5 minutes un bruit étrange se fait entendre: un clang-clang anormal qui n'a rien de rassurant sachant que 2OH de route de montagne délabrée nous attendent. Les passagers s'agitent, s'inquiètent, commencent à se rebeller. Deux-trois hommes se découvrent un esprit de leader syndical et crient: "tout le monde descend du bus! Même vous, les gringos!" Au moins le message est clair. Les passagers exigent que l'entreprise change le véhicule. Mais elle n'en a pas d'autre. "Comment ça?!". Indignation générale, dispute entre les passagers. Un homme s'inquiète "Mais je dois être demain à Ayacucho pour mon commerce". Une jeune femme, un bébé dans chaque bras, s'écrie "Que la chef de l'entreprise monte avec nous si ce n'est pas dangereux!". Une vieille dame me tire par la manche "Parle-lui toi. Elle t'écoutera!". Des cris s'élèvent "Exigeons de voyager dans la sécurité! C'est la responsabilité de l'entreprise!". La chef en question fait venir un mécanicien pour garantir qu'il est sûr de voyager dans ce véhicule: autant dire que je faisais moyennement confiance à ce petit mec sorti de nulle part et payé par l'entreprise pour faire semblant de regarder le moteur et déclarer que tout va bien. Au bout de 3H passés à attendre sur le parking, des liens se sont noués entre les passagers: les femmes assises sur un bord de trottoir allaitent leurs enfants et discutent, tandis que les hommes se font passer un paquet de cigarettes. Cette rébellion populaire étaient des plus intéressantes: bien que pauvres, ces péruviens n'acceptaient pas que l'on se foute ouvertement de leur gueule en leur filant un bus aussi dégradé. Nous sommes devenus les gringos officiels du groupe, mais malgré notre affection naissante pour ce petit groupe d'indignés, en pleine nuit nous décidons que le plus sage est de renoncer à notre escapade à Ayacucho, le bus paraissant vraiment hors d'état. Nous retournons à Cuzco passer la nuit.

Le lendemain, bien déçus de ne pas avoir pu partir, il faut prendre une décision: que fait on? On se décide un peu par hasard pour deux jours à Huacachina, un minuscule oasis près de la côte péruvienne, perdu au milieu de dunes du sable dignes du Sahara. Nous arrivons sous une chaleur désertique assez extrême, à l'opposée de la fraîcheur des hauteurs péruviennes. Malgré le côté un peu superficiel de l'endroit (ces restaurants et piscines surgis au milieu du désert...) il est loin d'être déplaisant. Au bout des rues, des dunes de sable.

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SAM_3180Les rues se heurtent à une obstacle naturel: les dunes!

Le truc à faire dans le coin, c'est le sandboard. Plutôt amusant cette descente des dunes, mais attention ça secoue (autant dans le 4x4 que sur les sandboards). Les paysages sont à l'opposée de tout ce que l'on a vu au Pérou jusqu'à présent: de majestueuses dunes toutes lisses et un superbe coucher de soleil.

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SAM_3163Vue sur l'oasis de Huacachina.


C'est également la première fois depuis le début de notre périple qu'il fait assez chaud pour se baigner!

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Une autre attraction de la région c'est las Islas Ballestas, que j'ai personellement trouvées moches et puantes. Mais c'est vrai que la concentration de lions de mer et d'oiseaux y est impressionnante

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C'est donc ressourcés et reposés que nous repartons en direction de Cuzco, d'où nous devons rejoindre Puerto Maldonado, ville dans l'Amazonie, non loin de la frontière avec le Brésil, dans le but de passer côté brésilien. 

Nous avions entendu tant de mal sur la ville que nous ne l'avons même pas vraiment vu: on a loué pour notre nuit sur place un bungalow dans la jungle. Ce complexe de plusieurs bungalows est tenu par un très étrange couple: un Suisse allemand et une thailandaise.  L'expérience fut mémorable: des plantes et des fleurs étranges dans tous les recoins, des insectes énormes, des singes... La chaleur est inimaginable, et à la différence de Huacachina il fait très humide.

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La journée est passée à se baigner mais SURTOUT à essayer de récupérer nos affaires, subrepticement dérobées par des singes très malins et evil! Très rapidement ils sont devenus obsédés par nous et nous suivaient partout, squattaient notre bungalow, volaient nos affaires. L'un d'eux a dérobé le T shirt de Eliott, puis s'est placé au dessus de lui, dans un arbre, enfilant le T shirt pour le narguer. Quelques photos de ces bêtes endiablées qui nous firent tout de même bien rire: 

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SAM_3197SAM_3194Photo prise lors d'une nième attaque de singe!!!

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Le soir venu, nous nous dirigeons vers le bungalow central pour que la femme du couple de propriétaires nous prépare un délicieux plat thailandais. On se déchausse avant d'y pénétrer, et on dîne en la compagnie de plusieurs allemands faisant du volontariat dans le coin. La plupart sont là depuis plusieurs mois: ça se voit à leurs jambes rongées par les centaines de piqures de moustique. C'est ainsi que nous apprenons que c'est un soir très spécial puisque les locaux emmènent les volontaires faire l'expérience d'une étrange drogue amazonienne. "C'est une drogue qui peut t'aider à connaître la réponse aux questions importantes qui se posent dans ta vie.", affirme l'un. "Tu peux parler avec ceux qui sont morts!" s'exclame un autre. La thaïlandaise affirme que cela lui a permis d'arrêter de boire (en remplaçant une addiction par une autre, vraisemblablement ?) . Tous suivent une préparation depuis une semaine: ils mangent léger et ont jeûné pendant les 24H précédant la prise, et évidemment, pendant toute la semaine: pas d'alcool, pas de sports violents, pas de tabac, pas de sexe. 

Comment s'appelle cette drogue? "Ayahuasca!" me répond-on. Mes oreilles bourdonnent: l'Ayahausca, cette drogue que le Lonely Planet qualifie de "the most potent psychedelic of the planet"?! C'est une drogue apparemment extrêmement puissante et fortement hallucinogène, qui se pratique en présence d'un chaman: l'expérience mystique dure plusieurs heures, pendant lesquelles les drogués ont des visions, parfois terrifiantes mais aussi révélatrices. Nous n'en saurons rien, puiqu'à des kilomètres du moindre poste de santé et n'ayant fait aucune préparation, nous n'allions tout de même pas tenter le diable. 

Le lendemain, chacun se réveille doucement et nous quittons un peu tristes cet endroit extraordinaire et ces gens si bizarres pour passer côté brésilien, à Rio Branco.

SAM_3212 Attente d'un père et sa fille au poste frontière entre Pérou et Brésil.

3 avril 2012

Le Machu Picchu, la cité dans les nuages

Le départ pour le Machu Picchu, c'était un peu ce que nous attendions tous depuis trois mois, depuis le mois de novembre où nous avions fait notre réservation sur internet pour le trek, depuis le mois de juillet où nous étions arrivés en Argentine en sachant qu'un jour on finirait par gravir les marches peu commodes des incas, depuis plus loin encore.

Alors ce lundi 30 janvier, à 5h du matin après un repas fabuleux la veille dans un très bon restaurant de Cuzco pour se préparer, une courte nuit et un petit-déjeuner frugal, nous sommes à la fois fatigués, stressés et excités. Le bus de l'agence est censé venir nous chercher à l'hotel pour nous emmener à Ollantaytombo, d'où débutera notre trek. Sauf qu'à 6h, le bus n'est toujours pas là, et que nous commençons à nous inquiéter, d'autant plus qu'il ne fait pas chaud à Cuzco en cette saison, en cette heure-là. Notre futur guide finit par arriver en retard, dans un taxi : ils nous avaient légèrement oubliés, rien de grave. Nous rejoignons le reste de notre petit groupe de français dans le bus, et posons un premier regard sur les gens qui nous accompagneront durant les 4 jours du trek. Paf, voilà, c'est parti et ça commence par 1h30 de dodo -entrecoupé par une pause p'tit dej et achat de baton de marche - jusqu'à Ollantaytombo, village faisant parti de la Vallée Sacrée des Incas, et seule ville du continent à avoir gardé le même tracé qu'à l'époque inca. Arrivé là, nous faisons les derniers préparatifs de nos sacs, nous filons nos pauvres 6 kgs à nos porteurs (j'en parlerai plus loin, ces gens là sont d'un autre monde) et partons en route... enfin nous pensons, car il faudra encore faire la queue une petite heure avant de pouvoir arborer fièrement le tampon d'entrée de l'inca trail apposé dans nos passeports, traverser le petit pont en bois tout brinquebalant, et se dire que ca y est, nous sommes sur les traces des incas... (en compagnie d'une petite centaine de touristes).

Après quelques minutes de marches, notre petit groupe s'arrête pour faire les présentations. J'ai oublié tous les noms, mais outre les 8 français qui constituaient notre groupe (eux je me souviens à peu près de comment ils s'appellent), nous allions passer 4 jours avec quatre australiens, un anglais, et deux américaines. L'occasion de pratiquer notre anglais, et de parler dans le dos de ces foutus anglo-saxons en français. Un bonheur. Dans le même temps, nos deux guides, Juan le leader et son side-kick, tentent de nous expliquer dans un anglais imparfait mais avec un enthousiasme et une bonne humeur contagieuse comment va se dérouler notre journée.

Pour agrandir les photos  cliquez dessus.

SAM_3013 Notre petit groupe à l'entrée du chemin. Ou bien le moment du trek où on a l'air le plus frais...

Le premier jour est tranquille. Nous marchons quelques heures sur un terrain relativement plat, ce qui nous permet de discuter, de s'habituer à un certain rythme de marche, et de profiter du paysage. Car dès le début, l'inca trail nous révèle son charme et ses mystères. En effet, très tôt, nous rencontrons des ruines en contre-bas, anciennes terrasses agricoles des incas. La vue est magnifique, et nous avons un premier aperçu des connaissances techniques, astronomiques et artistiques de ce peuple vieux de plus de 500 ans. Sans être impressionnantes, ces ruines nous mettent l'eau à la bouche.

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Nous continuons notre marche à travers une végétation luxuriante et tropicale jusqu'au premier campement où nous nous arrêtons pour nous manger. Là les porteurs commencent à nous impressionner, et ils ne laisseront pas de le faire durant toute la durée du trek. Car,  quand nous arrivons, une tente a été installée, avec à l'intérieur des tables, des assiettes et des couvertes, des petits tabourets, et, surtout des plats incroyables, qui le sont d'autant plus qu'ils sont cuisinés au milieu de nul part, à plus de 2500-3000m d'altitude. Ce sera ainsi chaque jour, matin midi et soir. Ces tentes, ces tabourets, ces provisions etc, ce sont les porteurs, une vingtaine en tout pour notre groupe de 15, qui les portent, en plus de nos affairs et des leurs : environ 20 kilos sur le dos de chacun. Ils ont entre 17 et 50 ans, certains sont en tongs, voire carrément pieds nus, ce qui ne les empêche pas d'aller dix fois plus vite que nous qui hâletons comme des cancereux. Ils sont très clairement d'un autre monde.

L'après-midi, la pluie nous surprend, et elle tombe assez fort pendant toute la marche jusqu'à notre arrivée au campement, où, applaudis par les porteurs qui sont déjà là depuis des heures et ont eu le temps d'installer toutes les tentes où nous allons dormir, nous arrivons exténués, mouillés, et prêt à dormir, ce que nous ne manquerons pas de faire un peu plus tard, mais pas sans avoir joué à notre désormais traditionnel partie de loup-garou au cours de laquelle, ca en étonnera plus d'un, j'eu la chance d'être villageois. La première nuit dans la tente n'est pas des plus agréables, mais nous nous y faisons, et réussissons à attraper au vol quelques heures de sommeil. 

SAM_3041 Bienvenue dans notre humble demeure.

Et nous en aurons besoin, car le deuxième jour est le plus difficile. Ce jour-là, nous allons faire l'ascension du col de la "Femme Morte" (the Dead Women's Pass) toute la matinée, monter ainsi jusqu'à 4200m, puis redescendre par l'autre côté l'après-midi. Pour l'occasion, Juan nous fait un petit exposé sur l'importance de la feuille de coca. Celle-ci est vendue à bas prix par grand paquet et permet de mieux respirer en altitude. Le problème, c'est qu'à force d'en prendre comme une tradition, elle semble avoir un effet un peu abrutissant et légèrement addictif ce qui donne à certains péruviens, mais surtout à de nombreux boliviens, un air un peu... eh bien coké tout simplement, c'est à dire un peu à côté de leurs pompes pour le dire avec une expression d'un autre temps. Mais la coca existe depuis des centaines d'années, et les incas eux-mêmes l'utilisaient pour vivre en altitude. D'ailleurs, souvent, les sculptures ou idoles incas ont une joue un peu gonflée car eux-mêmes sont représentés comme de grands consommateurs de coca. (Par ailleurs, il faut quelque chose comme un millier de feuilles de coca pour faire un gramme de cocaine, et malgré nos efforts répétés, nous n'avons pas réussi à en ramener assez pour lancer un petit business ici à Buenos Aires. De toute façon, j'imagine que le marché est un peu saturé).

Bref, nous partons donc, un peu angoissés, appréhendant cette journée de marche qui risque d'être longue, longue, longue. Le paysage est vraiment magnifique, bien plus impressionnant que le premier jour, et la vue étant assez dégagé, nous pouvons voir le sommet des montagnes baigné au loin dans les nuages. Pour la première fois, et pas la dernière, on se sent non seulement privilégiés d'être ici mais aussi un peu seuls sur ce chemin, et comme revenu quelques siècles en arrière (malgré les touristes). Sauf que très vite, et malgré les pauses répétés et le superbe brunch qu'on nous sert à mi-parcours, nous n'en pouvons plus. Les paysages et les chemins par lesquels nous passons sont très beaux, en pleine forêt, mais il nous faut faire un sacré effort pour lever la tête et en profiter. Nous maudissons ces imbéciles andins pour avoir créer des escaliers aussi ridiculeusement grands et inégaux, et pour être aller se percher en haut des montagnes. Nous avons arrêté de compter les marches depuis longtemps.

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Arrivés en haut, à 4200m, nous sommes accueillis par les autres trekkeurs qui applaudissent, et nous contemplons le paysage en profitant d'une pause bien méritée. Cette matinée était vraiment difficile, même si avec le recul je pense qu'on l'avait imaginée encore pire. En tous les cas, nous sommes très fiers d'être arrivés là-haut, en pensant que le plus dur est passé. En fait, le reste n'est pas si simple que ça. Nous devons encore descendre 800m jusqu'au campement où nous passerons la nuit, et avec la fatigue, la petite pluie qui commence à tomber, et les marches bien stressantes à descendre, nous sommes un peu nerveux et mal-assurés. Je manque de tomber plusieurs fois (je crois bien être tombé une fois) et nous sommes bien contents d'arriver au campement vers 15-16h où nous attend un superbe goûter fait de pop-corn, fruits, et autre petits gâteaux. Nous passons le reste du temps à jouer aux cartes, puis après diner simple mais délicieux, allons nous coucher pour se préparer au lendemain, qui est le jour le plus long.

Autant dire que nous ne fermons pas l'oeil de la nuit. Nous sommes encore assez haut en altitude, et le froid est absolument insupportable. En plus, nous dormons sur un sol rocailleux, et il est très difficile de trouver le sommeil. Alors le matin venu, nous ne sommes pas vraiment en forme pour repartir. Il faut un bon petit-déjeuner, et une bonne dose de motivation pour se lancer à l'assaut de la montagne. Heureusement, le troisième jour est le plus beau.

En effet, nous commençons par l'ascension de deux cols successifs, beaucoup moins hauts et difficiles que ceux de la veille. Nous croisons des ruines, qui étaient, il me semble, un ancien "fort" inca, puis nous continuons à monter. Du haut du deuxième col, qui est je crois à 3900m, la vue est incroyable.

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SAM_3047Les joyeux randonneurs. Si vous me cherchez dessus, un indice: j'ai le plus grand chapeau.

 C'est à ce moment-là que je décide de tomber deux fois en glissant sur des pierres et de m'écorcher la main. Mais passons. C'est aussi à partir de là que le chemin que nous empruntons est à 100% celui que les incas utilisaient. Et nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Cette journée à elle seule vaut l'argent que nous avons payé pour ce trek. Nous passons par des sentiers magnifiques, entourés de végétation étrange et unique. Avec Cléa, nous nous amusons à repérer les orchidées, et à essayer de trouver des animaux. Nous finirons par rencontrer une biche pas peureuse du tout !

SAM_3060SAM_3061La végétation. 

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SAM_3081SAM_3080 Cette orchidée s'appelle une "lagrima" en raison de sa forme de larme. 

SAM_3071SAM_3072 La biche.


Les paysages sont à couper le souffle, et cette fois, nous en profitons pleinement car la marche est assez facile, sans trop de montée ou de descente exténuante. Nous croisons deux magnifiques ruines incas, une étant un ancien temple ou observatoire (je crois) où nous avons un aperçu de la façon qu'avaient les incas d'enterrer leurs morts : ils les "accroupissaient" et les laissaient dans l'enfoncement d'un mur préalablement creusé. C'est ainsi qu'on a découvert de très nombreuses momies, en tout cas, celles qui n'avaient pas été pillées.

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Pour le reste les photos parlent d'elles-mêmes. De mon côté, je suis étrangement en forme malgré la terrible nuit dernière. Nous nous rapprochons du Macchu Picchu, et bientôt, nous pouvons apercevoir le haut des montagnes qui entourent le site. Juan nous dit : "Vous voyez, là bas : c'est le Machu Picchu, et le Wayna Picchu et pom pom pidou". Nous sommes impatients.

Nous arrivons au campement le soir, les images de la journée plein la tête. Nous sommes vraiment dans un état particulier, parque nous savons que le lendemain nous allons voir le Macchu Picchu, que c'est l'apothéose de ce trek et aussi de ce voyage que nous organisons et attendons depuis longtemps, et que bon, c'est quand même une des Sept nouvelles merveilles du monde. Nous passons la soirée à jouer au Loup Garou avec les anglo-saxons à qui nous avons appris les règles, le chef cuistot a fait un gâteau vachement bon pour nous dire au-revoir, et nous participons à la "cérémonie du pourboire" : les porteurs ne nous accompagnant pas sur le site, nous allons leur donner leurs pourboires dès maintenant. Ensuite nous allons nous coucher car le lendemain, nous noous levons à 3h du matin pour être les premiers sur le site.

Le 2 février, nous sommes réveillés à 3h, nous déjeunons en vitesse, et puis nous partons dans le noir total... jusqu'à la porte du site, qui ne s'ouvre qu'à 5h. Nous sommes les premiers, et nous avons 2h à tuer, ce quer nous ferons en jouant à des jeux débiles et en prenant des photos d'un intérêt discutable. A 5h, ca y est, les portes s'ouvrent. La course commence, car tout le monde veut être le premier à voir le Machu Picchu, à se faire la photo souvenir, en sachant que de toute façon, une petite centaine de personne le suit juste derrière. Ce qu'on ferait pas. Après 1 heure de marche, ca y est, la cité inca nous apparait. Le Macchu Picchu et le Wayna Picchu juste derrière sont entourés de nuages, ce qui n'empêche pas de les voir mais donne, au contraire, à la scène une ambiance mystérieuse, mystique et hors du temps.

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Nous prenons notre temps en haut pour faire les photos de groupe, les photos individuelles, les photos de paysage, les photos de cet angle-là, puis de cet angle-ci, avant de commencer à descendre vers le site à proprement parler, où nous retrouverons Emma et Marie qui sont montés par le train. Puis Juan nous fait une visite guidée, et ensuite nous avons un peu de temps pour trainer dans la cité.

Un petit mot donc sur ce fameux Machu.

Si nous avions peur d'être un peu déçu, autant dire que le site en lui même a dépassé les plus folles de nos attentes. Nous connaissions déjà, grâce aux nombreux musées que nous avons croisés, les grandes qualités de l'art inca, leur maitrise des textiles, de la sculpture et des couleurs, et leur inventivité sans limite. Mais au Machu Picchu, toutes ces qualités, cette maitrise et cette beauté semblent avoir être à leur apogée. Les incas semblent avoir mis toutes leurs forces, leurs connaissances et leur talent dans la construction de cette cité dont on ne sait toujours pas à quoi elle pouvait bien servir : résidence secondaire des chefs, cité secrète pour préserver la culture inca des colonisateurs, ou autre chose, personne ne le sait avec certitude. Peut être que si les incas avaient été un peu plus malins et avaient inventé l'écriture, ils auraient pu nous en dire quelque chose.

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Ce qui est sûr c'est que le mystère dû à cette absence de témoignage ajoute au charme du Machu Picchu (à défaut d'autres mots que je ne trouve pas). En effet, en plus de la beauté de ce qu'on a sous nos yeux, s'ajoute la grâce et la splendeur de ce qu'on imagine être ou avoir été. Car ces ruines, encore une fois du fait de l'absence d'information que l'on possède à propos d'elles, se prêtent plus que n'importe quelle autre à l'imagination et au rêve. Et c'est l'effet combiné de la vision de ce qu'on a devant nos yeux et de l'imagination de ce que cela a pu ou aurait pu être qui font du Machu Picchu une véritable merveille.

Concrètement, le site est très grand, et se divise en deux parties : la partie de l'agriculture, constituée de grandes terrasses qui font un peu penser à des rizières en fait (je serais bien incapable de dire comment ça marchait) et une autre partie qui est religieuse il me semble depuis laquelle on observait les étoiles et en déduisait le rythme des saisons, etc. Personne ne sait comment les incas ont pu construire cette cité à cette endroit (Le site est entouré de quatre montagnes, ce qui avait apparemment un sens particulier), et de nombreuses méthodes architecturales utilisées par ce peuple seraient apparemment impossible à reproduire aujourd'hui.

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Bref, nous repartons du Machu Picchu vers 13h, un peu tristes mais comblés. Nous attendons à Aguas Calientes pendant toute l'après-midi puis nous prenons le train qui nous ramène à Ollantaytambo en compagnie d'australiens imbéciles qui créent une altercation des plus rigolotes.

Nous sommes de retour à Cuzco le soir même, et après un McDo qui semble de rigueur, nous retournons à l'hôtel et la suite, c'est pour le prochain article (tadam).

 

 

25 mars 2012

La capitale impériale: Cusco

L'arrivée à Cuzco était un moment important du voyage:  d'abord car on arrivait enfin dans cette cité mythique, capitale de l'empire inca aux mille trésors, d'où nous allons partir à la découverte de l'incroyable Machu Picchu, site le plus populaire d'Amérique du Sud.  Ensuite car après cette étape notre groupe allait éclater: certains continueraient au Pérou, d'autres iront directement à Rio de Janeiro, et Eliott et moi nous acheminerions peu à peu vers le Brésil. C'était donc la dernière étape que l'on faisait tous ensemble, la fin et le point culminant de votre voyage Bolivie-Pérou. 

Cusco est une ville magnifique, qui concentre de véritables merveilles datant aussi bien de l'Empire inca que de l'époque coloniale. C'est une ville en hauteur, située à 3500m d'altitude et constituée de pentes et de collines. 

La Plaza de Armas, superbe centre autour duquel se déploie cette ville toute en ruelles et passages, possède une curiosité: c'est la seule place d'Amérique latine où il y a deux Eglises, la Catedral et la Compania de Jesus. De nuit, la vue est des plus belles.

Pour agrandir les photos, cliquez dessus

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La Catedral, très large, ressemble presque à un château. Pendant ce voyage, nous avons vu BEAUCOUP d'Eglises: des petites, des grandes, des sobres, des baroques... Mais si je devais n'en retenir qu'une ce serait celle de Cusco.

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A l'intérieur, elle est aussi superbe et étonnante qu'à l'extérieur. Elle est véritablement unique, pleine de surprises et de magnifiques peintures et objets religieux.  Elle s'organise en trois parties assez distinctes, et possède de nombreuses petites chapelles encadrant un gigantesque maître-autel couvert d'or et merveilleusement sculpté. On y trouve maintes exemples du syncrétisme catholique-andin typique de la région: par exemple, cette immense version de La Cène, dans laquelle Jésus porte une jupe inca et dîne d'un cochon d'Inde grillé!

La Compania de Jesus est également un magnifique édifice. A défaut de pouvoir être plus large que la Catedral, elle est plus haute, ce qui nous donne encore à voir la concurrence qui existait entre les catholiques et l'ordre des jésuites lors de leur arrivée en Amérique du Sud. Comme la plupart des monuments de la ville, il était un palais inca avant d'être une Eglise puisque ces charmants européens avaient pour coutume en arrivant de raser les constructions incas mais en prenant bien soin de garder les fondations, exceptionnellement solides, pour construire leurs Eglises PAR-DESSUS. Oui c'est assez odieux. 

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L'intérieur offre en apparence un beau style baroque plutôt extravagant tout en dorures, mais en s'approchant on note plusieurs curiosités liées à l'adaptation du catholicisme au contexte et et à la population locale, ce qui aide à appréhender cette combinaison fascinante de deux cultures. Par exemple, dans ce maître-autel doré, on trouve des sculptures d'aliments locaux: avocats, bananes, épis de maïs... Les peintures représentant une union de l'Inca et des jésuites sont aussi légion. 

Le Museo de Arte Religioso présente aussi une exceptionnelle collection, l'occasion d'en apprendre un peu plus sur la "escuela cuzquena".

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SAM_2975Ici, Jesus porte une jupe inca. Le cadre un bois qui entourne le vitrail a des motifs de bananes, avocats,...

En effet si au premier abord on peut considérer ces peintres anonymes qui ne signaient presque jamais leurs tableaux de simples imitateurs de l'art colonial, on ne tarde pas à remarquer leur style assez singulier, reconnaissable à une perspective assez plate, à ces motifs floraux qui entourent les tableaux, et à l'utilisation excessive de dorures. Ce sont ces tableaux qui offrent les plus beaux exemples de syncrétisme culturel au Pérou, je trouve: des Vierges toutes dorées et vêtues d'un grand triangle qui renvoie à la divinité de la Montagne, extrêmement importante dans la culture inca. Le bébé Jesus, quant à lui, se retrouve complètement emballé dans des tissus à motifs colorés, à la manière des bébés péruviens. 

Les ruines les plus proches de la ville de Cuzco sont celles de Sacsayhuaman (ça se prononce vraiment Sexy Woman!). Je les ai trouvé plutôt décevantes: il n'en reste que peu de chose et il faut vraiment savoir faire usage de son imagination! En plus, c'est très cher pour ce que c'est. On a quand même une belle vue sur la Vallée de Cuzco.

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Le temple du Q'orikancha (ou Convento San Domingo, selon que l'on retienne le nom inca ou colonial du site) est en revanche une excellente découverte. A la base, c'était un temple religieux très sacré pour les incas. C'est pourquoi il était recouvert presque entièrement d'or et de pierres précieuses: cela explique qu'il ait été pillé par les espagnols dès leur arrivée. Ces derniers en ont profité pour construire un couvent dominicain sur les impressionnantes constructions incas ayant parfaitement résisté aux tremblements de terre de 1650 et 1950, contrairement à la partie coloniale de l'édifice qui s'était effondré comme un jeu de dominos. Il est reste du coup un site hybride: bien que la partie coloniale soit belle, c'est la partie inca qui impressionne. Ces gros blocs de pierre si parfaitement taillés afin de s'emboîter si parfaitement qu'ils n'avaient besoin d'aucun type de ciment? Non, c'est bluffant!

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Le Museo de arte precolombino possède une fantastique collection d'objets d'art pré-inca, superbement restaurée et mise en valeur. Cela est sûrement lié au fait que ce musée appartient et est géré par une grande banque, BVA Continental! En tout cas, on y trouve de beaux bijoux, notamment de curieux ornements nasaux ou pectoraux en argent, en or et en coquillages. On en apprend aussi beaucoup sur la variété de ces civilisations précolombiennes: chaque collection est différente, et elles sont toutes plus éblouissantes les unes que les autres. Celle de Nasca est très colorée, tandis que celle de Huari, plus sobre, met l'accent sur la perfection des formes... C'est impresionnant! 

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Au final, le seul reproche que je pourrais faire à Cuzco est d'être une ville où l'on voit peu le Pérou et les péruviens. En effet, dans les restaurants, les cafés, les magasins, il n'y a que des touristes. Pourtant la ville elle-même n'a rien d'une ville créée de toutes pièces pour les touristes comme certaines villes de Patagonie par exemple. Non, c'est plutôt une ville-musée, tournée vers son passé et son histoire, mais pas tellement vers l'avenir... Un peu l'inverse d'Arequipa. On y voit peu les péruviens vivre leur vie, la ville a un côté un peu "mort". Une ville-musée, donc. Mais quel musée! 

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Deux koalas à BA
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